[Interview] Michel Cloup : « l’envie d’un disque un peu consistant, pas forcément évident »

Nous revenons sur Catharsis en pièces détachées, le monumental double album publié par Michel Cloup, avec un interview que nous a accordés le Toulousain enragé, quelques jours avant sa sortie. L’occasion de comprendre le processus créatif, très différent, utilisé sur cet album en mode trio, et de faire le point sur ses projets parallèles.

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Photo : Julien Vittecoq

Benzine : Première surprise en écoutant ce nouvel album : c’est un double, ce n’est pas anodin. Peux-tu nous expliquer comment ce format s’est imposé ?

Michel : Le dernier album que j’avais fait (Backflip au-dessus du chaos), où j’avais travaillé seul, était quand même un disque assez recentré. C’était un disque de 40 minutes, 10 titres. Et puis je me suis mis à réécouter des disques, en particulier des doubles albums des Beastie Boys et de Sebadoh, avec beaucoup de variété musicale, même parfois des choses assez audacieuses. Les Beastie Boys m’ont fait vraiment écouter du reggae ! Sebadoh, il y a des pop songs, des chansons acoustiques, des morceaux rock et des morceaux carrément bruitistes : ça part un peu dans tous les sens. J’ai beaucoup écouté aussi le dernier album de JPEGMAFIA, un disque hip-hop dans le même esprit, mais avec des passages rock limite un peu fusion, mais réussis, des moments plus hip-hop, un espèce de truc un peu bizarre au final… Et je me suis dit, tiens, ce qui se dégage du début du travail, c’est qu’on va un peu vers ça, l’idée de faire un disque un peu fourre-tout, un peu long. Et donc allons-y gaiement !

Benzine : Autre choix fort : c’est un disque en groupe, à trois, publié d’ailleurs sous le nom de « Michel Cloup Trio »…

Michel : Pour Backflip au-dessus du chaos, j’avais eu envie de travailler seul, mais l’idée était de jouer avec des gens pour tourner sur scène, parce que seul, ce n’était pas possible. Du coup, Julien (Rufié) et Manon (Labry) se sont « collés » au projet. Julien, cela fait dix ans qu’on travaille ensemble, Manon, deux ans, c’est une copine du quartier en fait, on se voyait souvent. Et on avait déjà bossé ensemble quelques années auparavant, puis j’avais enregistré son groupe de l’époque, No Milk today, et du coup, je lui ai proposé de venir jouer de la guitare et de la basse sur scène. Comme ça s’est bien passé sur la mise en place du live du précédent album, je me suis dit ce serait cool qu’on travaille tous les trois sur le prochain album… J’aime bien aussi, au stade où j’en suis, les collaborations, casser au maximum les habitudes, trouver une énergie différente, une excitation, ne pas toujours faire les choses de la même manière. Je commence à avoir fait beaucoup de disques et j’ai vraiment besoin de sentir que je m’aventure sur des trucs nouveaux ou presque, en tout cas sur des manières de travailler différentes, pour trouver une sorte de fraîcheur.

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Benzine : Comment est-ce que ça s’est passé, concrètement; pour accoucher de ces compositions très diverses ?

Michel : Quand on a commencé, on a vraiment composé la musique ensemble. C’est-à-dire que j’ai eu, comme d’habitude, un peu d’impulsion sur certaines briques de morceaux qui arrivaient avec des briques de texte. On a fait une espèce de chimie, de tambouille tous les trois. Et en fait, très vite, c’est parti un peu dans tous les sens, aussi bien musicalement que pour les textes. On s’est dit qu’on serait toujours temps d’enlever des titres, de faire du nettoyage, de raccourcir. Et en fait, on a tout gardé. On a travaillé de manière assez libre. La règle, c’était qu’il n’y en avait pas. Donc, il y a vraiment des morceaux qui ont été faits de manière hyper différentes. Il y en a qui ont été composés de façon assez classique, où j’amenais une ossature, et Julien et Manon créaient plus des arrangements par-dessus. Il y a eu des morceaux où on est partis de rien sur des musiques, et après j’ai collé mes voix. Il y a aussi le morceau très long, Pour qui, pour quoi, qui est improvisé.

Benzine : Parlons-en, de ce morceau monumental de 21 mn, Pour qui, pourquoi ? C’est une espèce d’auto-psychanalyse à cerveau ouvert… Tu y parles de la condition d’artiste avec beaucoup d’inquiétude.

Michel : Tout-à-l’heure, quelqu’un me disait ne pas avoir vu passer les 21 minutes de Pour qui, pourquoi. C’est marrant, parce que c’est quand même 21 minutes d’un mec qui parle de la première à la dernière seconde, c’est long, quoi (rires) !… Ce morceau-là, c’était une réponse à un morceau du précédent album, Lâcher prise, sur lequel j’avais expérimenté un peu l’improvisation en studio, au niveau du texte et de la voix. Celui-là, je me suis dit, tiens, je vais faire une sorte de version XXL de Lâcher prise ! J’ai travaillé avec Julien, sur plein de petits samples, de beats qu’on a construits, plein de petites boucles qu’on a programmées. J’ai mis ça dans mon logiciel, avec ma télécommande, j’ai écrit un texte, mais en laissant quand même beaucoup d’espace, c’est-à-dire que tout n’est pas écrit. Donc, j’ai fait « play », « record », j’avais mon texte, et j’ai avancé dans mes cellules de rythmes.

Le morceau, c’est une vraie prise live. En fait, il n’y a pas de montage, un peu d’édition, parce que par moments, je butais sur des mots. Forcément, vu que j’improvisais, j’ai enlevé quelques petits bouts par-ci, par-là, qui étaient un peu foireux. Mais globalement, c’est une improvisation. Et après, on a habillé ça avec de la musique supplémentaire. Quant au texte, ça va craindre pour nous tous [artistes] dans les années qui viennent. Donc, je me suis dit que c’était peut-être le moment d’en parler.

Cloup Photo Julien Vittecoq 03Benzine : Pascal Bouaziz (Mendelson, Bruit Noir) est aussi présent sur ce morceau… C’est un compagnonnage artistique qui dure entre vous.

Michel : Là, il a fait juste un petit cameo, un petit coucou. Ça me faisait rire quand même qu’il participe au truc. Clairement, je parle de lui juste avant [dans le morceau]. En plus, on est dans une forme de morceau qui n’est pas si loin de Bruit Noir. Je trouvais ça marrant qu’il me pose cette question « Tu fais quoi dans la vie, artiste ? Non, mais comme métier ? ». Au début, je l’avais enregistré avec ma voix, mais je lui ai demandé de le refaire.

Benzine : Et dans la foulée, l’estocade, avec un instrumental de 14 minutes, qui se termine avec un cri primal !

Michel : Oui, c’est un instrumental avec des cris. Après Pour qui, pourquoi, l’idée c’était qu’on parlait plus. Y avait plus de mots, ça y est, « ferme ta gueule, Michel, maintenant, on gueule ! » Pour celui-là, on a fait deux improvisations de 30 minutes sur un riff. Je leur ai dit « tiens, on fait ce riff ». Et après, j’ai édité, j’ai reconstruit un morceau à partir des bouts d’improvisation. Et on a a rajouté des instruments par-dessus. Enfin voilà, on a fait une espèce de tambouille. Donc l’album, c’est vraiment assez expérimental dans la manière dont ça a été fait. C’est vraiment partir dans tous les sens, à la fois de manière assez traditionnelle et à la fois de manière complètement bordélique.

Benzine : Ça n’a pas posé de problèmes avec ta maison de disques (Ici d’ailleurs) ?

Michel : Non, au contraire, ils aiment beaucoup le disque. J’ai un label qui est super. C’est même eux qui m’encouragent à aller plus loin dans les expérimentations. Donc non, je ne vais pas me plaindre !

Benzine : A titre personnel, je pense qu’il y a le choix risqué qui est celui du deuxième single, David, Goliath et Godzilla, qui n’est pas la chanson la plus évidente pour cela, notamment compte tenu de sa durée.

Michel : Ah ben oui, moi je suis un peu d’accord aussi. Je me suis rallié aux arguments de mon label, le fait que l’on était sur un terrain très différent de d’habitude, à la fois sur la forme humoristique du texte, et sur la forme musicale, beaucoup plus électro, et que, du coup, cela mettait en lumière une facette un peu nouvelle de mon travail. Après, c’est clair que ce n’est pas vraiment un single avec un refrain qui tape.

Benzine : Le premier single, La honte, est plus évident de ce point de vue.

Michel : Oui, tout à fait. Mais, musicalement, elle est quand même risquée quand on connaît mon travail : il y a une espèce de passage un peu afro-beat, c’est particulier… Après, c’est pour ça que je tenais à ce qu’il y ait au moins trois singles. Peut-être qu’il y en aura plus, peut-être qu’il y aura d’autres vidéos, parce qu’en fait le disque part dans tellement de directions différentes que je ne voudrais pas que les gens s’arrêtent et se disent « tu vois, Godzilla ou La Honte, tout l’album va être comme ça », ça ne m’intéresse pas. C’est un album qui est dense, c’est pas le genre de disque que tu te mets, format 40 minutes et bam, tu prends ça dans ta gueule… Il faut le laisser infuser, y revenir, réécouter parce que, bon, 75 minutes, c’est un peu long quand même (rires), Et j’avais envie de ça, d’un disque consistant, et pas forcément évident dès la première écoute.

Benzine : Il y a aussi un duo avec le musicien toulousain Nonstop, aussi, sur le 3ème single, très mordant, limite violent, Hachoirs et machettes. A l’écoute, votre duo coule sous l’évidence.

Michel : Frédo « Nonstop », c’est le frère du bassiste de Diabologum, donc, je le connais depuis les années 90. On se connaissait sans être des amis proches. Il y a deux ans, il a sorti un nouvel album et il me l’a envoyé. Ça faisait dix ans qu’on ne s’était pas vus. Et j’ai trouvé le disque chouette, comme son précédent, sorti en 2020. Et du coup, on a mangé ensemble. Et là, il y a un truc qui s’est passé. Je pense que dans la vie, il y a des gens qui vieillissent bien, en fait. Ça arrive, quoi. Il n’y a pas que des gens qui vieillissent mal (sourire). Du coup, un soir, je lui ai envoyé un message en disant « ça te dit qu’on fasse un morceau ? » Je lui ai proposé qu’on fasse un ping-pong de SMS, je t’envoie une phrase, tu m’envoies une phrase. Donc on a fait ça jusqu’à très tard. On a accumulé évidemment beaucoup trop de texte, et donc, après, on a découpé là-dedans avec des hachoirs et des machettes. Et on a fait un titre. Il m’avait envoyé un petit bout de beat. Il m’a dit « j’aime bien ce beat ». Mais c’était vraiment un petit sample. Donc j’ai retravaillé autour de ce sample, on a construit une musique avec Julien et Manon. Et Fredo est venu. Et naturellement, on a posé les voix. Le morceau était fait. Ça a été très facile. C’est marrant parce qu’on n’avait jamais travaillé ensemble, et c’est pas toujours évident que ça fonctionne. Il y a des gens, des fois, avec qui tu essaies mais ça ne marche pas. Et là, ça a marché très bien. On s’est revu depuis, on a tourné le clip.

Catharsis en pièces détachéesBenzine : Après ces chansons très politiques, dans la première moitié de l’album, la deuxième partie semble plus intime ou personnelle, avec Pour qui, pourquoi donc, mais aussi dans chansons comme Place du Ravelin ou Maria.

Michel : On a construit un track-listing avec le matériau qu’on avait pour essayer d’avoir quelque chose de fluide, de pas trop heurté, parce qu’il y a des amplitudes différentes et des formes différentes, il fallait trouver l’ordre qui rende l’album un peu digeste, et évident. C’est peut-être pour ça qu’après tous ces morceaux politiques, on part sur cette espèce d’instru assez court, un peu fantomatique, on arrive sur le morceau Place du Ravelin qui est beaucoup plus soft, on arrive sur Maria, et c’est clair que dans la thématique même du texte, c’est proche. C’était pas vraiment voulu, ça marchait bien comme ça au niveau du tracklisting. Il fallait donner une cohérence à quelque chose qui, quand même, est fait de bric et de broc.

Benzine : A chaque nouvel album de Michel Cloup, on te dit « en colère », un terme utilisé et revendiqué de ta part, dès ton premier album solo, avec la chanson Cette colère. Il y en a sur ce nouvel album, mais on y entend aussi des choses plus inattendues : de la joie, de l’espoir…

Michel : On m’a souvent dit qu’en fait, ma musique, mes textes, ne me représentaient pas forcément à 100% ce que j’étais dans la vraie vie. On m’a dit par exemple qu’avec moi, on rigole beaucoup, que je dis beaucoup de conneries, qui font rire…. Et que ce serait peut-être pas mal qu’on l’entende dans mes chansons. Et du coup, j’ai essayé, je me suis un peu essayé à ça… A l’humour, en fait ! J’ai essayé d’être un peu drôle sur quelques titres ou passages. Après, c’est pas non plus la grosse poilade, c’est pas Rires et chansons (rire). En fait, j’ai toujours essayé d’être entre le noir et la lumière, entre l’obscurité et le soleil. Pour moi, il y a toujours matière à gueuler, à être pas content, mais il y a aussi toujours des moments où il y a quelque chose qui sauve tout, qui fait relever la tête. Sinon, j’aurais arrêté d’écrire des chansons. Sinon, il y a plein de choses auxquelles j’aurais renoncé, je n’aurais pas de famille ni d’enfants. Pour moi, il y a toujours quelque chose qui permet d’aller mieux ou d’avoir à nouveau un peu d’espoir, c’est indissociable.

Benzine : Et puis, tu as des sacrées punchlines. Notamment, il y a Le poison / L’antidote, chanson où tu démontes tout le discours libéral dominant (« Au boulot les crevards ! ») et où tu as un verdict définitif : « Scoop, le monde d’après sera pire ». Tu y évoques un thème très contemporain, le passage de la post-réalité à la post-vérité, et ceux qui en sont les artisans.

Michel : C’est juste ce qui se passe, non ? Pour le coup, cette chanson, elle est très, très noire, bien sûr. Moi, c’est des états par lesquels je passe. Il y a des moments, vraiment, je pense que « non seulement on va tous mourir, mais en plus, ça va faire mal », quoi ! Et puis, il y a des moments où je me dis, « Ah ben non, non, il y a quand même… » Il peut y avoir des bonnes nouvelles, on peut être surpris [positivement]… Donc j’essaye de mettre le doigt là où ça fait mal, mais aussi là où ça fait du bien, quoi. Même si, clairement, là, on a plus de raisons de s’inquiéter, quand même, que d’être joyeux. Et s’inquiéter, c’est aussi commencer à prendre conscience de certaines choses, et c’est pas si mal.

Benzine : Autre chose inhabituelle, il y a du name dropping aussi : Albini, Dogbowl, Godard, Richter.. Je vois bien pourquoi tu peux citer les trois premiers, pourquoi ils font partie de ton Panthéon personnel, ou pas loin. Pour Richter, qui est dans l’actualité avec son exposition à la Fondation Vuitton (que tu cites aussi, ironiquement, dans la même chanson !), tu peux nous expliquer ?

Michel : J’ai vu une expo de lui à Berlin il y a une dizaine d’années qui était grosse aussi, il semblait que c’était la plus grosse… Gerhard Richter, il a commencé par le figuratif de l’ultra-réalisme pour aller vers l’abstraction. La fin de sa carrière, maintenant, c’est de l’abstraction pure. C’est le mec qui a fait le chemin à l’envers. Normalement, les peintres, ils commencent en faisant de l’abstraction et petit à petit, ils peuvent aller vers le réalisme. Lui, il a fait tout à l’envers. Il a commencé par faire des peintures qui ressemblent à des photos et maintenant, il fait des formes de couleurs.

Benzine : J’aimerais aussi qu’on dise un mot sur le graphisme tranchant et épuré de l’album.

Michel : C’est Stéphane Arcas qui a fait les peintures. Stéphane, c’est un ami avec qui j’ai travaillé sur des pièces de théâtre, qui aussi est auteur et metteur en scène, qui s’est remis à la peinture parce que, à l’origine, il est peintre, il a une grosse production depuis deux ans, et quand j’ai vu ses œuvres je me suis dit « bah, ça irait trop bien avec l’idée que je me fais de cet album ! », qui n’était pas encore composé. Et donc je lui ai proposé… Il m’a envoyé un message quand il a reçu le vinyle, il m’a dit « c’est super, les peintures, ça colle bien avec le côté hétéroclite du disque, il y a un côté cabinet des curiosités. » J’aime bien. L’idée avec ce disque, c’était d’explorer plein de formes de la voix, plein d’états au niveau des textes, plein de formes musicales, plein de manières de chanter. Et ce n’est pas un hasard si ça se termine par un long cri…

Benzine : Si l’on prend un peu de recul par rapport à ta production solo, duo, et trio désormais, post Diabologum et Expérience, avec le recul, est-ce que tu vois des périodes ? Moi, j’y vois des disques plus intimes au début.

Michel : Oui, les trois premiers albums, c’est un peu une trilogie, très dépouillée. Ça se termine par une adresse en Italie qui clôt le chapitre. Là, vraiment, c’est très intime. Après, ça redémarre clairement sur autre chose. Là, je suis dans une période où je rejoue en trio. Je remets beaucoup de machines. Je suis dans un truc plus « moderne ». De quoi demain sera fait, je n’en sais rien.

Benzine : Pour la prochaine tournée, tu as déjà une idée sur les futures setlists ?

Michel : On a beaucoup travaillé, on a fait des résidences en juillet à Nîmes et en septembre à Toulouse. On a un track-listing, essentiellement des nouveaux morceaux, un ou deux du précédent disque. On a bien travaillé, bien avancé. C’était un peu un challenge parce que les trois quarts des titres, on les a enregistrés sans les jouer, donc il a fallu les adapter à la scène et ça a demandé du boulot. C’est beaucoup plus électronique que le précédent, mais tout est « joué » : on ne fait pas « play » sur l’ordinateur en faisant semblant de jouer derrière… Il y a pas mal de titres où Manon est seule à la guitare, et où je prends le micro, donc ça change du précédent live et c’est chouette.

Benzine : C’est totalement exclu d’entendre une ou deux chansons de tes premiers albums plus intimes dans les setlists de la tournée de ce nouvel album ?

Michel : On n’est pas du tout dans cette ambiance-là… C’est juste que, à un moment, dans des options musicales, et ce que ça raconte, ça met le doigt sur un truc plutôt qu’un autre. Après le troisième album en duo, qui était guitare – batterie, j’ai vraiment eu l’impression que voilà, la messe était dite, et si j’allais en faire un autre, j’allais retomber sur les mêmes types de morceaux. Enfin bon, je me disais, il faut changer, sinon ça va être chiant. Mais c’est vrai aussi que, l’autre jour, quand je répétais le ciné-concert que je joue en ce moment, je ne sais pas pourquoi, j’ai joué le riff d’un de ces anciens morceaux, L’Enfant, avec juste une boîte à rythmes. Et je me suis dit : peut-être qu’à un moment donné j’aurai envie de faire des dates où je rejoue ces albums-là en fait, solo, en rejouant ces trucs persos dans des petits lieux, très intimes. Ça peut être une piste de concerts pour les années qui viennent, on verra.

Benzine : Tu as évoqué le ciné-concert autour du film de Frank Beauvais, Ne croyez surtout pas que je hurle, projet lancé l’an passé. Peux-tu nous en dire un peu plus ? Est-ce que tu vas continuer à le jouer ?

Michel : Je l’ai joué hier soir à Poitiers [le 5 novembre] ! C’est un ciné-concert qui m’a été proposé par la Cinémathèque de Toulouse, pour leur festival. J’ai suggéré ce film que j’avais beaucoup aimé quand il est sorti. Ce qui m’intéressait, c’est qu’on n’était pas dans le cadre du ciné-concert traditionnel avec le film muet qu’on illustre. Là, ce que je voulais, c’était de garder cette voix-off qui parle du début à la fin, et décline ce texte. Faire de la musique sur le texte et sur les images, et construire quelque chose qui soit un accompagnement musical de cette voix. C’était un challenge parce que la voix est assez monotone, il y a un rythme assez « blanc ». Et ce qui devait ne faire qu’une seule date tourne depuis un an, deux ans. J’ai joué dans pas mal de villes, c’était beaucoup plus que ce que j’imaginais au départ. J’ai rencontré le réalisateur, Franck Beauvais : on avait déjà échangé des messages par les téléphones, et on s’est rencontrés quand j’ai fait la première. C’est une chouette personne. Il était très content du rendu, ça m’a fait plaisir. C’est toujours un peu stressant quand tu travailles sur la matière des autres…

Benzine : C’est une nouvelle expérience après celle qu’était l’album, et les concerts, pour décliner A la ligne, le livre de Joseph Ponthus (décédé en 2021). Est-ce que c’est fini, ou ce spectacle sera encore visible ?

Michel : On l’a rejoué il y a 15 jours, à Talence et à Angoulême. On le rejoue le 21 novembre à Beauvais. S’il y a d’autres offres, on le refera puisqu’on a remis la machine en marche. C’est un projet qu’on avait prévu de continuer à jouer. Mais là, avec ce nouvel album qui sort, je voulais favoriser mes tournées à moi, car ce projet s’adresse potentiellement aux mêmes publics, aux même salles. À un moment, il faut prioriser un peu. Le ciné-concert Ne croyez surtout pas que je hurle, c’est autre chose parce que ça ne s’adresse pas aux mêmes programmations, donc, pour le coup, ça peut tourner en même temps.

Propos recueillis à Paris par Jérôme Barbarossa le 6 novembre 2025.

Nouvel album :

Michel Cloup Trio – Catharsis en pièces détachées
Label : Ici d’ailleurs
Date de sortie : 14 novembre 2025

Michel Cloup Trio en concert : release party le 12 décembre à Petit Bain (Paris), puis en tournée en 2026.

A la ligne, adaptation du roman de J. Ponthus, par et avec Michel Cloup, Pascal Bouaziz et Julien Rufié, le 22 novembre à Beauvais (Auditorium Rostropovitch).

 

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