Le retour flamboyant à Paris de The Hives tombe à point nommé en cette fin d’année. Leur rock explosif et jouissif est la réponse à tous nos maux hivernaux. Prêts à prêter allégeance aux rois du rock venus du Nord ?

Nous sommes en novembre, il fait nuit tôt, le froid est arrivé, la fatigue accumulée cette année nous tombe sur les épaules et dans un peu moins d’un mois, nous allons subir enfants et oncles grincheux autour de la table de Noël. Autant dire que le moral est au plus bas. Heureusement, la solution pour oublier tous ces tracas se trouve en ce jeudi soir au Zénith de Paris. Elle nous vient de Suède, balaye tout sur son passage, telle une tornade, à grands renforts de guitares fracassantes. Cinq vikings en costumes noir et blanc rehaussés de leur propres néons, à l’énergie qui ferait fonctionner à elle seule une centrale électrique durant une année entière, The Hives reviennent à Paris et cela fait du bien.
Notre dernière rencontre remonte à 2024, lorsque The Hives ont investit la grande scène de Rock en Seine. Encore éclairés par la lumière du jour, les musiciens ont pourtant fait rayonner le Domaine de St Cloud, malgré la masse inerte et peu intéressée de fans de Maneskin agglutinée face à la scène. Mais c’était mal connaître Howlin’ Pelle Almqvist, le leader blond et déchaîné de The Hives, pour qui ces peccadilles importent peu. Rien n’empêche Pelle d’aller chercher son public, aussi peu coopératif soit-il. C’est donc motivés comme jamais que nous le retrouvons enfin en tête d’affiche, après avoir eu la chance d’assister en septembre à un concert privé, filmé par Arte Concert dans une chapelle à Paris, mettant en scène les funérailles fictives de ce dernier, où finalement, tel Lazarus, il revient d’entre les morts pour assouvir sa passion du rock, et la nôtre en passant.

Ce soir, The Hives voient grand pour nos retrouvailles. C’est en effet un Zénith finalement bâché au dernier quart qui accueille les spectateurs, mais cela passera totalement inaperçu tant la température sera à son maximum toute la soirée. Nous avons droit à une entrée en matière de haute volée avec Yard Act en seconde première partie (le groupe ayant entamé les hostilités en tout début de soirée, Spiritual Cramps, nous ayant fait l’effet d’un mauvais tribute band dédiés aux héros du jour). Yard Act viennent de Leeds, ont à leur actif deux albums brillants, The Overload et Where’s My Utopia?, entre post punk et art rock. Ils ont eux aussi un leader charismatique en la personne de James Smith, chanteur sans guitare au spoken word iconique, dont les textes pisse-vinaigre et remplis d’humour noir collent parfaitement à la personnalité de The Hives. En seulement trente minutes, nous replongeons dans leur univers fait de guitares saturées et d’une ligne de basse dévastatrice qui permettent un mariage habile de sensations punk teintées d’une dose de beats groovy tellement addictifs. Pas impressionné pour un sou, James Smith remportera haut la main le défi qu’impose d’être un support band : les néophytes sont conquis et les fans déjà acquis à leur cause sauront rendre la pareille lorsque James viendra les chercher au plus près. Trente minutes qui passent trop vite, et l’envie déjà pressante de retrouver Yard Act l’an prochain avec leur troisième album, en ce moment même en préparation.
Mais ce soir, toutes les attentions se tournent vers les cieux lumineux de la Scandinavie. S’affichant tels des monarques en hermine blanche et couronnés sur la pochette de leur dernier disque, The Hives Forever Forever The Hives, le groupe rappelle ainsi à ceux qui l’auraient oublié que sa domination est réelle. Maniant toujours avec subtilité un très haut sens de l’ironie et du sarcasme, ce sont pourtant bien en conquérants que The Hives prennent possession de la scène, avec un décor impressionnant. De gros ballons illuminés forment le nom du groupe, et les costumes sont eux-mêmes équipés de guirlandes lumineuses, dont on se demande comment malgré le poids des batteries que chacun doit avoir collé à la poitrine, les musiciens arrivent à se démener ainsi.

C’est évidement Pelle qui mène le show. Personnalité devenu iconique dans le monde du rock, ce dernier ne se démarque pas une seule seconde de son personnage de leader égocentrique et égocentré. Et c’est cela que les fans recherchent, Pelle inondant son public après chaque titre de tirades sur le fait que The Hives sont ce qu’il y a de meilleur, et ne cessera de s’adresser à lui pour réclamer toujours plus de bruit, toujours plus de mouvements (de nombreux circle pits se déclencheront ainsi tout du long du concert, pour son plus grand bonheur), et toujours plus d’amour car c’est cela qu’ils viennent chercher. Mais dans leur grande magnanimité, nos amis nous en rendent une belle partie. La setlist ce soir favorisera les deux derniers albums The Hives Forever Forever The Hives et The Death Of Randy Fitzsimmons, car The Hives ne font pas dans la nostalgie de leurs premiers albums, pourtant devenus des classiques. Le groupe n’a tout simplement jamais cessé de travailler, et au gré des disques, on trouve toujours deux ou trois singles eux-mêmes classiques en devenir.

Une avancée fait ce soir son apparition en plein milieu de la fosse, et c’est abondamment que Pelle viendra la parcourir, en allant également se percher à la barrière, au plus près de son public. On retrouve quelques gros hits du groupe, entre Walk Idiot Walk, Main Offender, Come On! et Tick Tick Boom, des chansons qui sèment dans la fosse un chaos infernal. Le degré de dinguerie qu’opère le rock de The Hives rend chaque spectateur extatique, la communion se fait naturellement avec les musiciens. Plus le set se déroule, plus l’ambiance devient bouillonnante, malgré quelques réfractaires dans les gradins qui peineront à se lever.
Le petit bonus de ce soir sera le retour dans la setlist de Barely Legal, tout premier disque de The Hives avec Here We Go Again, concentré de punk qui, en seulement deux minutes, explose tout sur son passage. Le son du groupe, bien que restant toujours électrifiant, s’est structuré avec le temps, pour en arriver à des morceaux catapultés au rang d’hymnes, tel le single éponyme The Hives Forever Forever The Hives, titre faussement boursoufflé à la gloire de nos héros, une déclaration d’amour également adressée à leurs fans, fidèles pour beaucoup depuis bientôt trente ans, sans qui rien ne serait possible. C’est d’ailleurs à de nombreuses reprises que Pelle déclarera à son tour tout l’amour qu’il porte à Paris, évoquant leur tout premier passage à la Boule Noire il y a presque trois décennies, devant un public circonspect mais qui en est ressorti totalement conquis.

Le final voit donc tout le Zénith scander à l’unisson le nouvel hymne du groupe, Pelle venant serrer moult mains au premier rang tout du long de la scène et de l’avancée, la ferveur déclenchée étant digne d’un meeting politique à l’américaine. Plus d’une heure et demie de folie furieuse, pas une seconde de répit ne nous est accordée, et le défouloir que représente cette soirée chaude en tout point permet de cranter le statut de poids lourd de la scène rock internationale de The Hives, ces derniers demeurant pourtant toujours très proches de leurs fans. Pas prêts de raccrocher les gants, nos monarques préférés sont donc attendus pour le prochain round. The Hives Forever !, c’est eux-mêmes qui le disent.

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Texte et Photos : Laetitia Mavrel
The Hives, Yard Act au Zénith de Paris
Production : Radical
Date : le jeudi 20 novembre 2025
Leurs derniers albums :
Yard Act – Where’s My Utopia?
Label : Universal-Island Records Ltd.
Date de parution : 1er mars 2024

The Hives – The Hives Forever Forever The Hives
Label : Play It Again Sam
Date de sortie : 29 août 2025
