Jesse Sykes and The Sweet Hereafter – Forever I’ve Been Being Born : pour des lendemains encore plus beaux

Ça y est, Jesse et Phil sont de retour ! Le 5e album de Jesse Sykes and The Sweet Hereafter est à la hauteur de l’attente : vocaux majestueux et hantés, guitares somptueuses, et toujours ce dark folk ancré dans les grands espaces américains. Un must de cette fin d’année 2025.

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Photo: Anita Nowacka

Il aura fallu attendre quatorze ans pour pouvoir déguster ce nouvel album de Jesse Sykes and the Sweet Hereafter, et douze depuis le festival Fargo et leur concert au Divan du Monde. Douze ans à chercher des informations, à harceler ceux qui les connaissent, à tenter de comprendre ce silence et espérer.

 Jesse Sykes & The Sweet Hereafter Forever, I’ve Been Being BornUn peu d’histoire pour ceux qui prennent le train en marche : Le groupe est né de la rencontre entre Jesse Sykes et Phil Wandscher en 1998. Ce dernier était loin d’être un inconnu à l’époque, et sortait à peine de Whiskeytown, avec lesquels il avait enregistré Strangers Almanac qui demeure encore à l’heure actuelle l’un des plus grands disques d’Americana de tous les temps, quand Ryan Adams était le plus grand espoir du rock américain.  Le premier album, Reckless Burning, sorti en 2003 sur Fargo mérite d’être dans toutes les discothèques :  la première écoute de la chanson titre et la voix de Jesse ont fait chavirer tous ceux à qui j’ai pu la faire découvrir. Oh My Girl comprenant l’exceptionnel Your Eyes Told est d’une beauté à pleurer. Deux albums ont suivi jusqu’à cet extraordinaire Marble Son de 2011, manifeste de rock psychédélique West Coast avec un son durci, qui s’ouvrait par un Hushed By Devotion épique et plein de promesses. Avant que tout ne s’arrete… Jusqu’à ces premiers concerts depuis 2011, fin 2023, aux Etats Unis, signes annonciateurs de ce retour si attendu, confirmé par la présence de Jesse Sykes en première partie de Sunn 0))) en avril 2024.

Il serait faux de dire que Jesse et Phil reprennent l’histoire là ou ils l’ont laissée. Forever I’ve Been Being Born n’est pas la suite de Marble Son, et se la joue modeste dans ses arrangements, plus proches de ce qu’ils réalisaient au début de leur aventure commune. Le disque a eu une longue gestation, certains titres ayant été initiés il y a plusieurs années. Ils sont ici accompagnés par Rebecca Young à la basse et Jason Merculief à la batterie, ainsi que ponctuellement par du violon ou du piano. La star reste la combinaison entre la voix unique de Jesse et la guitare de Phil.

Feather Treasure démarre l’album, et nous frappe instantanément par son caractère apaisé, avec sa guitare acoustique. Comme si Jesse avait acquis une nouvelle sérénité depuis que nous l’avons quittée. Gentle Chaperone bénéficie d’une section de cordes et du chant de Marissa Nadler accompagnant Jesse, c’est le premier titre marquant du disque, la guitare de Phil y est discrète dans un premier temps avant de s’élever majestueusement. Dewayne est un morceau folk traditionnel qui parait d’abord mineur, mais prend de l’ampleur à chaque écoute. Le son de la guitare de Wandscher est magique et d’une subtilité stupéfiante. Il suffit pour s’en persuader d’écouter I Still Hear Lorelei, morceau très calme dominé par Wandsher, et Winter’s Empty Pages et son solo après deux minutes qui permet au titre d’être l’un des meilleurs moments d’un disque qui n’a pas de ventre mou. Dead End Pools est plus traditionnellement country, et nous amène sur le territoire de Tarnation, un très grand groupe de country alternative dont le Gentle Creatures de 1995 a forcément été écouté par une Jesse Sykes qui semble rendre hommage au chant de Paula Frazer.

La présence de Nadler aux harmonies de Oh, My Sitter et du morceau titre Forever I’ve Been Being Born renforce naturellement leur signature sud gothique, qui est déjà une tendance forte de la musique de Jesse et Phil. Ce dernier morceau a de fait une tonalité plus sombre que les précédents, et ses sept minutes s’inscrivent dans l’imagerie traditionnelle de l’Ouest américain. Après un My Sweet Hereafter mélancolique et chanté en solo par Phil, A New Medium conclut dans un registre nettement plus « dark », dans la musique comme les textes (« But did you hear the last word? / Death’s a broken record », il a des façons plus optimistes de clôturer un album !), et par deux dernières minutes rock qui annoncent peut-être la suite.

Ce disque ne va pas quitter la platine avant quelques semaines.

A noter également, pour ceux qui s’intéressent encore aux objets, la grande qualité de la présentation du CD, et les magnifiques photos, souvent prises par Jesse elle-même.

Laurent Fegly

Jesse Sykes and The Sweet Hereafter – Forever I’ve Been Being Born
Label : Ideologic Organ
Date de sortie : 28 novembre 2025

 

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