Simon Konianski

affiche_1.jpgS’attaquer par le biais de la comédie douce-amère aux relations juives à  l’intérieur des familles minées, voire déchirées, par le poids de l’Histoire et la question de la judéité n’est donc plus l’unique apanage de réalisateurs d’outre-Atlantique (on pense ici, bien sûr, à  Woody Allen et Wes Anderson, qui, en plus de partager les mêmes initiales, ont en commun d’avoir fait de ces problématiques le coeur de leur oeuvre). Voici un Européen, Micha Wald, un Belge en l’occurrence, qui s’y met, lui aussi fortement influencé par ses souvenirs et son expérience personnelle. Autant dire que Simon Konianski, le trentenaire pas vraiment sorti de l’adolescence, affublé de grosses lunettes et d’une minerve, éternel malade imaginaire, de retour chez son père Ernest, doit bien présenter quelques similitudes avec le jeune bruxellois. Peu importe après tout et arrêtons-nous plutôt sur ce long-métrage assez inattendu, sans prétention à  délivrer un message, oscillant entre portrait de groupe et road-movie.

Simon Konianski se pare d’abord des atours de la comédie la plus divertissante et loufoque qui soit. En pleine crise existentielle (la mère de son fils Hadrien, une danseuse goy, l’a plaqué pour un bellâtre noir et sans boulot, il en est à  jouer le cobaye pour tester des nouveaux traitements médicaux), Simon retourne au bercail chez Ernest. Un père, polonais d’origine, veuf archétype du Juif, près de son argent, vilipendant arabes et allemands, ressassant sans fin ses souvenirs de guerre et se lamentant chez le rabbin de l’oisiveté de son fils. Lequel, sans doute plus par esprit de contradiction, se pose en pro-palestinien, pourfendeur des traditions, balayant d’un geste le passé de son géniteur que celui-ci n’arrête pas de lui rabâcher.

On pense que le film va dresser avec malice et une pointe d’autodérision le portrait de ce garçon qui refuse de grandir et des relations entre amour qui ne s’avoue pas et chamailleries incessantes qu’il entretient avec Ernest et le reste de la famille. Jusqu’à  la maladie de ce dernier et la mort rapide qui s’ensuit, épisode que le film évoque à  peine pour atteindre directement la seconde partie, : une expédition en Ukraine pour y enterrer le corps du défunt, selon ses dernières volontés, auprès d’une certaine Martha, qui fut la première femme d’Ernest. Une tranche de vie dont Simon n’a jamais entendu parler. Au volant d’une vieille bagnole, en compagnie de son fils, du frère et de la soeur du mort, il s’embarque pour un périple plein de rebondissements et de significations. La réconciliation post-mortem n’est pas une surprise, mais les chemins que Micha Wald emprunte pour en ériger les fondations réservent quelques jolies scènes, notamment lorsque Simon et Hadrien font une halte devant un ancien camp.

Le film vaut beaucoup pour la truculence de ses personnages, jeunes ou vieux. On s’engueule fort dans cette famille, tout le monde y va de son conseil pour Simon l’hypocondriaque angoissé, bringuebalé entre une ex petite amie, Espagnole volcanique, et des aînés débordants d’énergie – l’oncle paranoîaque qui voit des agents de la Stasi partout, la tante volubile et même le papa décédé, revenant en fantôme harceler son fils velléitaire.

La bande originale festive et décalée – morceaux de jazz et de musique noire – dynamise le film, très coloré, flirtant avec les codes de la bande dessinée, en surchargent personnages et décors sans se prendre au sérieux. Cela évite au réalisateur d’alourdir et de signifier un propos – le parti pris de la comédie, jouant sur des registres différents, peut être discutable, mais Micha Wald maintient le cap. Il ne faut pas aller chercher plus loin et rire gentiment avec lui des travers de ce petit monde.
Un spectacle approprié pour une séance estivale.

Patrick Braganti

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Simon Konianski
Film canadien, belge de Micha Wald
Genre : Comédie
Durée : 1h40
Sortie : 29 Juillet 2009
Avec Jonathan Zaccaî, Popeck, Abraham Leber,…

La bande-annonce :

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