Restless

Avec son nouveau film Gus Van Sant surprendra un peu son public en semblant musarder à  la périphérie de son oeuvre. Celle-ci était traditionnellement dévolue à , d’un côté, : les films de commande grand public (Prête à  tout, Harvey Milk) et de l’autre, : les objets arty volontiers conceptuels (Elephant, Last Days), ; et ce, souvent sans négliger la qualité de l’un ou l’autre des ses différents versants, le classicisme des uns équilibrant le radicalisme des autres, et inversement. Restless semble d’autant plus une discrète parenthèse dans sa filmographie, comme elle l’est surtout pour ses jeunes (anti) héros. À l’image du Two For Us des Beatles ouvrant le film, une modeste mais gracieuse bal(l)ade.

Avec son sujet  » Boy meets Girl,  » – Enoch, jeune homme fragile rencontrant Annabel, jeune fille condamnée sans appel par la maladie, tous deux fascinés par la mort – l’auteur d’Elephant,  évite soigneusement le côté pur mélodrame de ce sujet imposé en se tenant au milieu même de ses éternelles préoccupations de cinéaste, filmer l’adolescence et la jeunesse aux prises avec la mort.

Le tout, en optant résolument pour le mode mineur (Restless reste un film modeste qui jamais ne prétend à  être autre chose) et une douceur de touche constante, : douceur de l’automne lumineux de Portland, ville natale du réalisateur, douceur de l’image, élégante et discrète, douceur de l’idylle naissante entre les jeunes gens, douceur de leur physique d’angelots gracieux. Tous éléments au diapason de la petite musique qu’égrène sa jolie fable aux allures de rêve éveillé, mélancolie et douleurs secrète compris.

Si le début du film inspirera aux cinéphiles des souvenirs d’Harold et Maude (le jeune Enoch hantant les enterrements de parfait inconnus), si Annabel/Mia Wasikowska évoque une jeune Mia Farrow et Enoch/Henry Hopper un jeune Denis « Hopper (normal c’est son fils, !), pour peu qu’on accepte la fuite de la réalité et le caractère irréel aux allures de fugue empruntée par le couple, Restless est une charmante parenthèse, désarmante de simplicité, filmant la jeunesse qui tente d’exorciser la mort, à  la manière de deux grands enfants.

Deux enfants excentriques, petits dandys refuant l’âge adulte dialoguant avec un ami imaginaire, s’émerveillant des chants d’oiseaux, narguant les médecins ou répétant avec ferveur la scène de leurs ultimes adieux. Un goût pour la légèreté revendiquée qui, comme les jeux d’enfants, pourra se révéler confondante de naîveté ou d’une joliesse désuète, mais le plus souvent touchera par son juste mélange de gravité résignée et de douceur réconfortante.

Petit film à  la réalisation presque invisible (ça nous change chez Van Sant, et plutôt en bien) qui touche modestement aux choses graves de l’existence et élégiaque évocation de l’adolescence, ce micro-opus de Gus Van Sant aux airs de fugue distille une mineure mais radieuse morale, : il n’est que temps de profiter du temps qui nous reste. Bien reçu »

À signaler, toujours une impeccable bande-son chez l’ami américain, : Elliott Smith, Bon Iver, The Beatles, Nico ou Gus Vans Sant lui-même.

Franck Rousselot

Restless
Comédie dramatique américaine de Gus Van Sant
Sortie, : 21 septembre 2011
Durée, : 95 mn
Avec, : Henry Hopper, Mias Wasikowska, Ryo Kase « .

La bande-annonce :