5 + 5 = Les disques préférés de Colin Chloé

Le moins que l’on puisse dire c’est que le lorientais Colin Chloé exilé à Brest a choisi le temps d’une maturation, d’une lente macération entre chaque disque un peu comme un artisan qui revient sans cesse à son ouvrage, son troisième album Où L’Eau Te Mène se veut comme une oeuvre de synthèse. On a voulu apprendre à connaître ce que cache ces chansons lettrées et savantes.

Crédit Photo : Jérôme Sevrette

Vous ne connaissez peut-être pas le travail de Colin Chloé. Alors que son troisième album, Où L’Eau Te Mène, est sorti il y a peu, on a voulu mettre en évidence le talent singulier qui s’échappe de ses chansons et de ses trois disques. On dit souvent que les bretons sont des êtres peu diserts, avec cet échange autour des disques qui le passionnent, Eric Le Corre alias Colin Chloé casse ce cliché.

5 disques du moment :

Bill Callahan – Gold Record 

Sur ma platine depuis presqu’un an, un bien bel album du meilleur compositeur folk rock américain actuel, et de loin. Une voix et une écriture incroyables, et une très belle production. J’adore comme tous ses albums et Smog !

Nick Cave & Warren Ellis – Carnage

Beaucoup de mal à entrer dans cet album, comme pour les deux précédents. Et puis finalement, je me suis laissé faire petit à petit. C’est plus du Warren Ellis que du Nick Cave, c’est plus vraiment du rock, c’est autre chose…mais c’est plutôt beau. Bon,  j’ai quand même drôlement hâte au retour de Grinderman !

Dick Annegarn – Söl

Le seul francophone que j’écoute en ce moment. Un poète le Dick, une des plus belles plumes d’ici. Cette voix rugueuse, ce jeu subtil de guitare, c’est du blues, avec du jeu et de l’humour, il est le seul à pouvoir le faire ! Superbe album très épuré, guitare/voix, pas de fioritures, de je-noie-le-poisson avec des cordes et tout le bazar électro habituel de la chanson française actuelle à la con. Il n’avait probablement pas (plus)  les moyens d’une production coûteuse, du coup il a enregistré seul et tranquille de bonnes chansons chez lui, à la campagne. Tant mieux ! Du très bon. Bravo à lui.

Karen Dalton – It’s so hard to tell who’s gonna love you the best ( 1969)

J’écoute Karen depuis 2006, quand je l’ai découverte grâce à Nick Cave. J’écoute très souvent son 2e album studio In my own time  que j’aurais pu (dû) classer dans mes 5 albums de toujours. J’aime aussi son album 1966 enregistré chez elle sur un petit magnéto. Mais j’étais bizarrement passé à côté de ce premier album studio, que j’écoute en boucle depuis. Enregistré sobrement en trio d’amis guitares/basse, live en studio , la voix cuivrée de Karen y est détendue et somptueuse, les arrangements acoustiques et brutes lui offrent un merveilleux écrin. Je joins un lien rare ( si peu d’images de cette grande artiste injustement oubliée) et juste retrouvé d’un concert au festival de Montreux en 1971.

Piers Faccini – Shapes Of The Fall

J’écoute Piers depuis longtemps, j’aime son écriture et sa douceur. La chanson en ouverture de Shapes Of The Fall est un pur chef d’œuvre , je l’écoute en boucle. J’ai cette mélodie en tête depuis un mois ! Son travail de production est remarquable, et le métissage avec la musique berbère est d’un naturel désarmant…

5 disques pour toujours :

Neil Young – On The Beach 

L’album de Neil Young que j’écoute le plus souvent. C’est son album le plus blues, sombre, j’aime le son et l’ambiance particulière. Des chansons torturées, une chaleur de production  fantastique. Le Crazy Horse venait de perdre son guitariste Danny Whitten, et du coup on retrouve un mix entre le Crazy Horse et les musiciens de Harvest et de The Band. Fabuleux.

Leonard Cohen – Songs of Love and Hate

Je me souviens de la première fois où j’ai entendu Avalanche…J’ai été happé par ce titre qui me hante depuis, cette voix de baryton basse, si profonde et ténébreuse, avec un texte prophétique . Une des plus grandes chansons jamais écrites. L’album est sombre, Cohen est déjà amer (Last year’s man) et râle sur plusieurs titres, comme si le succès de ses  deux premiers albums lui restait coincé dans la gorge. Des chansons noires et poignantes et le fameux imperméable bleu…

Lou Reed – New York

Pas le plus connu des albums de Lou Reed, mais celui que je préfère et que j’écoute quasi chaque semaine depuis sa sortie en 1989…Une production simple et efficace, basse/batterie et 2 guitares (Nothing can beat 2 guitars bass & drums) et quelles guitares ! L’entente entre Mike Rathke et Lou Reed est parfaite. C’est leur meilleure collaboration. Lou Reed écrit sa ville, New York,  ses camés paumés, ses politiciens tarés, ses pasteurs illuminés des années 80 (et d’après…). Et puis cette chanson d’ouverture, Romeo & Juliet avec cette première phrase : « Caught between the twisted stars the plotted lines the faulty map that brought Colombus to New York. »

Nick Drake – Pink Moon

Nick Drake en solo total et en liberté. Les échecs commerciaux de ses deux premiers albums le poussent à enregistrer seul à la guitare ses nouvelles chansons. Son jeu est d’une créativité, d’une fluidité incroyables. Le son est doux et épais comme une moquette anglaise. Sa voix est calme, épurée, profonde. Finis les arrangements pompeux (qu’il n’aimait pas) des premiers albums, enfin les chansons dans toute leur beauté. Un chef-d’œuvre total.

The Clash – London Calling

Que dire sinon des fadaises quand on parle de ce monument du rock ? Il m’accompagne depuis mes 14 ans. Il m’a ouvert à bien d’autres musiques et m’a déniaisé politiquement. Joe Strummer me manque…que dirait-il du monde d’aujourd’hui ? Héraut, Héros.

Où L’Eau Te  Mène, le troisième disque de Colin Chloé est sorti en version digitale chez Hasta Luego / Believe  le 26 mars 2021