[Live Report] Johan Asherton – Secret Garden Show : l’inépuisable magie de la musique…

Le Rock français est tellement riche qu’il recèle même un certain nombre de véritables génies méconnus, comme Johan Asherton, qui nous aura enchantés lors d’un nouveau rendez-vous « secret » organisé par Life Is A Minestrone.

2021 08 29 Johan Asherton Secret Garden

« Dans quelques années, les Inrocks comprendront que nous méritons une place à côté de Heroin ou The End », déclare en plaisantant (à moitié), Johan Asherton, 63 ans, héros oublié, ou pire, ignoré du Rock français. Et, cet après-midi, nous qui nous entassons, « pass-sanitarisés » et masqués, à ce bel événement Life Is A Minestrone qui lui est consacré, il est difficile de ne pas être d’accord.

Johan est venu accompagné de Stéphane Dambry, guitariste précis, et de Loïc Kohler, bassiste joueur, pour nous interpréter la majorité des titres de son dernier album, paru l’année dernière mais encore jamais joué en public, Passiontide. Et il se pourrait même que ça soit le meilleur de toute sa longue carrière – entamée au début des années 80 -, ou en tout cas la magie qui a régné au cours de ce beau set de 1h15 nous en a tous convaincus…

 

2021 08 29 Johan Asherton Secret Garden
Photo : Carole Bigaud

Si le concert a commencé de manière discrète, avec trois reprises en solo acoustique d’anciens titres (avec en particulier le beau blues Ooh I Miss You), on sent que Johan est en train de retrouver ses marques, de replacer sa voix, cette voix riche, ample, profonde, que les années ont encore rendue plus touchante. C’est quand on attaque le vrai sujet de la soirée, les chansons de Passiontide, avec le soutien instrumental et vocal de Loïc et Stéphane, que la musique de Johan se déploie réellement dans toute sa splendeur (à noter, parmi bon nombre de plaisanteries échangées au cours du set, le fait que Joan ait qualifié ses musiciens de « Mamas & Papas » !). S’il est clair que nous n’aurons « pas d’acouphènes ce soir » – dixit Johan -, l’orchestration, même discrète, des morceaux leur rend formidablement justice, dans l’atmosphère de recueillement qui prévaut.

Premier coup de foudre pour nous, Rainbeaux, une chanson sur l’actrice de films de série B, Cheryl Smith, qui nous évoque l’élégance et la suavité de notre cher Elliott Murphy (un artiste finalement assez comparable à Johan Asherton) sur son inoubliable Night Lights. C’est dire, tout au moins à notre avis, le niveau d’excellence ! Comme Asherton peut chanter à peu près tout ce qu’il veut, il nous offre une cover majestueuse du Take A Chance With Me de Roxy Music, menée par le jeu de basse de Loïc, qui voit Joan se loger confortablement dans le costume à paillette de Bryan Ferry, mais également ajouter une sorte de profondeur mélancolique inédite… Sur Torment, après un démarrage difficile, Joan ayant du mal à retrouver la première phrase de la chanson, une évidence nous saisit : la voix, l’atmosphère, l’élégance sombre, on se sent comme dans le Coney Island Baby de Lou Reed. Oh, pas de copie, pas de plagiat, dieu merci, mais une sorte de communauté d’esprit, de rencontre de talents. Plus tard, le réjouissant Rock’n’Roll Dreams – riff velvetien, paroles emblématiques (« Listen to the Sound of your RnR Dreams ! »), et Johan qui lève le poing à la fin comme s’il était face à une foule immense sur une scène de festival – nous rappelle qu’il n’y a pas que de l’intimisme dans cette musique-là.

On aura même droit à un rappel de trois titres, qui se clôturera par une version incroyablement fine et pourtant intense de Behind Closed Doors, une chanson qui fait naître des images très cinématographiques. L’émotion est tangible parmi les spectateurs, et le mot « magie », prononcé et répété ensuite, illustrera notre sentiment à tous.

On n’a évidemment guère envie de se quitter après une si belle expérience, et on préférera rester un peu encore parler de musique avec les passionnés de Life is a Minestrone, et tous les amateurs de rock’n’roll qui sont venus partager brièvement le « Jardin Secret » de Johan Asherton.

Texte : Eric Debarnot
Photos : Carole Bigaud / Eric Debarnot