« Non Romanesque » de Theo Hakola : confession d’un américain à Paris

Artiste aux multiples facettes, l’américain francophile Theo Hakola, qui fut chanteur d’Orchestre Rouge et Passion Fodder, se livre dans Non Romanesque, un récit autobiographique coloré.

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© Jérôme Sevrette

Augmenté de nombreuses photos personnelles, de dessins signés R. Mosner et d’un Cd, Non Romanesque voyage dans le temps. Celui de Theo Hakola, né américain en 1954 et qui vit depuis plus de quarante années en France.

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De sa jeunesse dans le nord-ouest américain dans les années soixante, il dépeint une société en pleine évolution dans laquelle  la politique et la culture deviennent un sacerdoce.  Très proche d’un grand  frère Eric qui  s’enferme dans des troubles mentaux, Theo Hakola décrit  des rapports familiaux avec lucidité et pudeur. « Dire la vérité est toujours révolutionnaire ». Ces mots attribués à Antonio Gramsci sont le fil rouge de sa biographie. Parti à New York dans les 70’s pour défendre ses convictions politiques, il se prend  pour passion la guerre civile d’Espagne (1936-1939), qui va le structurer politiquement. Témoin impuissant de la montée du nationalisme aux Usa avec l’élection de T****, dont il n’écrit jamais le nom, il est tout autant sévère avec une certaine gauche française qu’il nomme Chico marxisme. Avec délicatesse, il revient sur ses amours de jeunesse, dont les portraits sont remplis de douceurs nostalgiques.

Arrivé en France en 1978 après un détour par le Guatemala, Madrid et Londres, Hakola succombe au charme du punk, surtout du Clash. Son analyse sur l’ambiguïté rock française est particulièrement bien vue. Entre l’attitude outrancière de la scène parisienne et le contenu musical assez lisse, Hakola s’en détourne et avoue une réelle admiration pour Philippe Pascal de Marquis de Sade, Métal Urbain, les Rita Mitsouko sans oublier Bertrand Cantat dont il produit le premier disque de Noir Désir.  Il revient sur la courte carrière de son excellent groupe post-punk Orchestre Rouge (1980-1984), dont le nom est tout sauf un hasard. Le single Soon Comes Violence reste à ce jour un des titres emblématiques de cette scène, produit tout comme l’album Yellow Laughter (1982) par Martin Hannett (Joy Division, Happy Mondays etc…).  Puis sa rencontre avec la musicienne Bénédicte Vilain fera de Passion Fodder (1985-1992) un groupe incontournable des scènes françaises dont l’univers est proche de celui de Nick Cave. Hakola emmène son groupe s’établir à Los Angeles, fort d’un contrat aux USA, mais sera frappé de malédiction lorsque leur principal soutien, Joel Weber d’Island Records, décèdera subitement à l’âge de 33 ans. Depuis, sa carrière est ponctuée d’albums solo, de collaborations diverses, de romans, de films et pièces de théâtre.

Theo Hakola, un artiste engagé qui ne se la raconte pas, comme pouvait l’être un certain… Joe Strummer.

Mathieu Marmillot

Non Romanesque
de Theo Hakola
Éditeur : Les Fondeurs De Briques
28 euros, 320 pages + Cd
Parution : 13 mai  2022

Dernier album paru :

Theo Hakola – Water is wet
Mediapop records – 24 janvier 2022