C’était soir de fête pour le groupe de Cabestany, qui a rempli l’Olympia en un claquement de doigts, au milieu d’une longue tournée des salles européennes et françaises. Car, désormais, et c’est un changement majeur, The Limiñanas ont un sacré public, et quasiment leur culte, dans leur propre pays !

Ce soir, c’est concert filmé ! Des panneaux annoncent assez vite la couleur à notre arrivée à l’Olympia, une fois l’étonnante zone fumeurs sur voie publique devant la salle du boulevard des Capucines franchie. Dans ces cas-là, on sait que l’on va assister à un show millimétré, peut-être trop parfait… et avec des invités. Le programme est ainsi posé, et va être déroulé par le groupe occitan durant une heure et demie, avec aussi, sans doute, pour objectif d’immortaliser ce moment, celui où les Limiñanas sont prophètes en leur pays.
Car la donne a changé pour les quasi-perpignanais, avec leur dernier album sorti récemment, Faded, et toutes les productions qui ont précédé, avec Laurent Garnier, Pascal Comelade, Brigitte Fontaine (la verra-t-on débouler de la rue Saint-Louis-en-l’Ile, en rappel pour un Cantilène ou un Crack boom crack surprise ?…), des dizaines de concerts dans le pays. Désormais, le groupe remplit facilement l’Olympia, complet depuis longtemps, et semble disposer d’une vraie popularité auprès des amateurs de rock hexagonaux, et même au sommet de la pyramide. Allons vérifier tout cela sur pièce.
Arrivés tardivement, on a raté la première partie, Juniore, qui a sorti il y a quelques mois un gentil album aux résonnances yéyé et se pose en héritier de La Femme, dont acte. Ils devraient finir logiquement sur la scène Firestone du prochain Rock en Seine, où on pourra les rattraper (ou pas).
21h05, une fois les quinquagénaires de l’audience rassasiés de bières à tarif prohibitif, les lumières de la salle peuvent s’éteindre. Le gang monte sur scène, tout de noir vêtu, dans sa configuration de tournée, à six sur scène : Lionel, barbe hirsute savamment ordonnée, à droite en regardant la scène, Marie, cheveux de plus en plus rouges, quasi grenats, au centre derrière ses fûts, entourés de gauche à droite, de Thomas Gorman (membre du groupe britannique Kill The Young, au chant), Alban Barate aux claviers et à la guitare, Clémence Lasme (qui collabore notamment avec Lucie Antunès) à la basse, et… le légendaire Keith Streng, oui, le guitariste des Fleshtones !
« Bonsoir, nous sommes The Limiñanas, de Cabestany », indique, précis, Lionel, en ouvrant le bal, seule indication orale au public de la soirée, mais ce n’est pas bien grave : avec eux, on sait ce qu’on est venus chercher. Du son, beau, fort, dense, du garage, du psychédélisme, un peu de yé-yé, des invités, et aussi une certaine idée que la vie, et même la réussite, imprévue telle une météorite (mais logique au vu du talent), est possible après 50 ans. Bref, on est venus « se rassurer », entre amis musicaux, tout en prenant une bonne dose de décibels (et de houblon, vu le nombre impressionnant d’allers-retours au bar, et sans doute aussi aux toilettes de l’Olympia, dudit public quinqua).
Et du son, il va y en avoir, dans un concert découpé en deux temps : une première moitié très « propre », où les morceaux sont courts, de format 3-4 minutes, puis des plages plus longues avec une montée en puissance sonore, qui culminera dans le rappel unique. La set-list déroulée sera celle de la tournée, désormais stabilisée, et qui est une forme de best-of du groupe, piochant dans toutes ses époques, avec 5 morceaux du dernier album, dont les 4 premières plages, jouées en début : Spirale introductive, puis Prisoners of Beauty, comme sur l’album, permettant d’instiller une ambiance néo psyché dense, mais aussi garage et tout simplement rock’n’roll. Et Thomas Gorman dans tout cela ? Il va s’acquitter correctement de sa tâche de chanteur de tournée, dès ce titre, très Primal Scream, jusque dans la voix… très Bobby Gillespie – et qui nous rappelle l’excellence du dernier album de ces derniers, que l’on verra avec grand plaisir dans quelques semaines sur une autre scène parisienne (à la Cigale, le 10 juin). A ses côtés, Alban Barate, Clémence Lasme et Keith Streng à leurs côtés martyrisent leurs instruments, ce dernier bondissant régulièrement sur la scène, visiblement heureux d’une nouvelle opportunité d’enflammer les scènes françaises.
Afin sans doute, que ce soir tout ne soit pas prévisible, Lionel et Marie ont prévu quelques surprises : d’abord, ils chantent – un peu : Marie sur Down Underground et Je m’en vais, en duo sur une de leurs chansons les plus anciennes, et sans doute fondatrices, Je ne suis pas très drogue, avec son côté post yéyé, qui sonne finalement (on y revient) un peu La Femme. Autre point inattendu, nos héros catalans préférés accueillent les invités dans la première moitié du concert : Rover, pour un magnifique Shout, Bertrand Belin (gros succès à l’applaudimètre, pas évident de la part d’un public très rock) pour J’adore le monde, très (trop ?) Bashung, également tiré de Faded, et Emmanuelle Seigner avec Shadow People, de l’album éponyme. Spoiler, Madame Brigitte ne nous honorera pas de sa présence ce soir. Cela a le mérite d’étonner. Pour le reste, le groupe joue sur les projections vidéo, de grande qualité, comme sur la tournée précédente de De Película, avec des images graphiques d’une belle expressivité, des spirales, des volutes, de la fumée, parfois des formes, des silhouettes, beaucoup de rouge et de noir, parfois des touches un peu dark, mais toujours de la vie et du mouvement – pour créer pour le spectateur un autre point d’attention, au-delà de cette musique assez instrumentale, parfaitement exécutée.
En réalité, la deuxième moitié du concert nous a semblé plus intéressante, après une montée en puissance un peu diesel, dans ce « ventre mou » du concert autour de l’heure de jeu, avec des titres instrumentaux et plus ralentis, comme The Gift ou Istanbul is Sleepy, qui s’écoutent sans passionner, et dont le concert aurait pu ne pas se relever. Mais le groupe va alors entamer une remontada finale de toute beauté, avec deux atouts différents et complémentaires : des plages de plus en plus longues et jouées, dans le rouge (au propre comme au figuré), et des covers – qui furent, en quelque sorte, les invités surprise de cette deuxième partie. Le groupe va ainsi reprendre les Cramps (TV Set, bien crade comme il faut pour réveiller le concert et le mettre sur les bons rails de la descente finale), Suicide (Rocket USA, parfaitement enchaîné avec Je rentrais par le bois… BB, dans une quasi plage unique néo psyché et bruitiste concluant le set) ; enfin, dans un hommage très appuyé par un film faisant défiler images marquantes de Nico et consorts, et logotypes du groupe, au Velvet (What Goes on, deuxième des trois chansons du rappel).
Cette fin en apothéose comprenait également El Beach, échappé de Malamore (2016), chanté-parlé par Lionel, parlant de mâche de graines de tournesol et d’Allemands en nage, idéal pour lancer le rappel, et Autour de chez moi, onzième plage de Faded, assez raccord avec El Beach, avec cette fois une voix enregistrée (permettant à Lionel de mieux se concentrer sur son vrai instrument pour le final ?) reprenant la métrique du poème Vaduz de Bernard Heidsieck façon cadavre exquis finissant néanmoins dans une orgie de décibels.
Au final, un très bon concert, comme prévu, allait-on dire, par un groupe, qui, au-delà de sa réputation « néo garage », sait régaler sur scène avec des shows huilés, filmés donc (De Pelicula, comme on dit en espagnol, de l’autre côté de leur frontière), mais bien vivants, de sang et de chair, de bruits et de mélodies. Et confirmant son statut, sans doute encore un peu inattendu pour eux, de tête de pont du rock d’ici, mais aussi d’ailleurs, en 2025.
Texte : Jérôme Barbarossa
Photos : Gilles Barbeaux
The Limiñanas en tournée :
Toutes les dates sur https://www.theliminanas.com/
Prochains concerts :
Londres (Electric Ballroom) le 12 avril
Berlin (Columbia Theatre) le 15 avril
Amsterdam (Tolhuistin) le 16 avril
Bruxelles (Ancienne Belgique) le 16 avril
Bourges (Printemps de Bourges, Palais des Congrès) le 18 avril
… puis Grenoble (La Belle Electrique) le 21 mai…
Liminanas, groupe occitan? Si le journaliste pouvait se renseigner avant d’écrire des couillonades pareilles, ça serait un peu plus crédible. Cordialement.
N’hésitez surtout pas à rejoindre notre équipe de passionnés – aucun d’entre nous n’est « journaliste » – pour nous faire bénéficier de vos éventuels articles « sans couillonnades ». On vous attend avec impatience.
Pourquoi, Cabestany n’est pas en occitanie? Je ne comprends pas votre commentaire du coup…. explications ?
Rigoureusement, c’est la Catalogne, pas l’Occitanie. Je suppose que c’est ça qui peut gêner.
Sur le sujet du concert, j’étais en mezzanine et j’ai trouvé le son assez confus, en particulier sur les voix complètement inaudibles. C’était ma position qui était mauvaise ou mes oreilles qui étaient bouchées ?
En fosse les voix étaient audibles.
Ok, merci. C’est vrai qu’avec des guitares pareilles, ce n’est sans doute pas évident de trouver la bonne balance pour tous le monde.
Rigoureusement, les Pyrénées Orientales sont intégrées à l’Occitanie… maintenant il s’agit aussi de la Catalogne bien sûr. On peut toujours discuter des sujets géographiques comme le golf du Mexique qui serait le golf d’Amérique selon certains cerveaux dérangés
Bonjour,
La Catalogne est administrativement en Occitanie et je pense très très bien connaître la région. Arrêtez de hater et jeter l’opprobe gratuitement. Ce papier n’a aucune vocation politique, contrairement à votre commentaire.
Allez l’Usap si ça vous fait plaisir !
vu à bordeaux le 3 avril,pour la 3 ème fois en concert, toujours aussi bon,avec Keith streng,un plus,et 2 reprises cramps et velvet,2 de mes groupes favoris de tous les temps
cool, moi je les revois aux Docks Lausanne le 23 Mai.
idem même discographie, et avec le Guitariste des Fleshtones,me réjouis d’avance..
Les voix étaient plutôt bien audibles sauf celle de Marie sur “ je ne suis pas très drogue “
Un peu déçu de ne pas avoir entendu de morceau de “de pelicula “ mais super énergie tout au long de ce set