Lundi soir, à Petit Bain, nous avons passé une belle et douce soirée entre amis, dont la talentueuse et trop méconnue Katy J Pearson. On vous raconte, pour vous donner envie d’en être, la prochaine fois !

Tous les concerts de Rock ne sont pas des moments de bruit et de fureur, où le maître mot est INTENSITE : il y a – au moins de temps en temps – des soirées qui ressemblent plutôt à des havres de paix, et qui permettent d’échapper une paire d’heures à la folie du monde. Et nous ne parlons pas cette fois de concerts folk acoustiques, mais d’un set d’indie rock / indie pop (même si on se moque pas mal des étiquettes), composé de belles chansons, bien chantées, bien jouées par des gens qui ont l’allure d’une bande d’amis heureux d’être là, ensemble, à Paris… et on ajouterait presque « bien écoutées », au milieu d’un public silencieux quand il faut, et empathique tout le temps. Ce qui, on est bien obligé de le reconnaître, n’est pas si fréquent que ça. Et quand en plus, les lumières sont bonnes, le son est excellent, et le plancher de la merveilleuse péniche qu’est Petit Bain tangue de temps en temps pour nous rappeler où nous sommes, n’est-ce pas finalement ça, le bonheur ?
20h30 : La soirée avait pourtant débuté dans une tout autre atmosphère, avec Léa Lotz, alias Bleu Reine, une jeune femme seule dans l’obscurité avec sa guitare électrique et son clavier. Elle joue ce qui s’appelle désormais – car on n’arrête pas le progrès – du post-folk, c’est-à-dire un mélange de folk, d’électronique, de dream pop, de post-rock. L’atmosphère générale est languide, mélancolique, voire franchement sombre, et un sentiment d’uniformité nous envahit peu à peu, accentué par un chant irrégulier et un son déséquilibré, parfois saturé, et globalement mauvais – en tout cas quand on est placé au premier rang. Seul moment totalement convaincant, un morceau rêche et douloureux à la guitare électrique, qui traite, si l’on a bien compris, des abus masculins : là, on se souvient que Léa a affirmé que PJ Harvey était son idole absolue, ce qui s’entend sur ce titre, et trace une voie plus intéressante à explorer que ses ballades introspectives et fantomatiques. Il faut toutefois préciser que Léa était très stressée, et a eu tout au long du set du mal à affronter les regards d’un public pourtant concentré et bienveillant. A revoir dans de meilleures conditions, donc, et ce d’autant qu’elle compose et chante en français (des textes pas toujours compréhensibles du fait du son), ce qui indéniablement un plus.
21h30 : Après les expérimentations hasardeuses et pas toujours convaincantes de Bleu Reine, on est ravi d’accueillir sur scène un quatuor Rock au format « classique », Katy J Pearson jouant et chantant accompagnée d’un guitariste, d’un bassiste et d’un batteur, le tout dans un bon esprit de camaraderie, voire de franche rigolade, quand le guitariste sera responsable de plusieurs « pains » dans la dernière partie du set. On est donc heureux de ne pas avoir sur scène l’électronique que semblait promettre le dernier album, Someday, Now, qui sera pourtant interprété dans sa quasi-intégralité (8 titres sur 10), avec l’aide quand même de quelques sons de claviers pré-enregistrés.
Pour ceux qui ne connaîtraient pas cette artiste à la réputation encore trop discrète, la musique de Katy J Pearson, qui nous vient de Bristol, est une indie pop assez typique des années 90, mais mâtinée de surprenants accents US, dans des registres parfois soul et parfois country. La voix est belle, même si elle est souvent assez haute, et les chansons bénéficient pour la plupart de jolies mélodies pop, qui mettent des sourires sur le visage des spectateurs.
Après un démarrage enlevé, avec en particulier l’accrocheur Those Goodbyes et le menaçant et envoûtant Alligator, suivis un peu plus tard du très beau Constant, le concert perd de sa dynamique avec une succession de morceaux mid tempo manquant d’aspérités. Heureusement, on sortira de ce léger « ventre mou » avec une dernière partie de set sous le signe de la complicité entre les musiciens, visiblement heureux de jouer et d’être là : d’ailleurs Katy nous aura avoué que ce qui l’étonne toujours, c’est de débarquer dans une nouvelle ville en Europe, et de trouver à chaque fois des gens qui connaissent et ont envie d’écouter sa musique. Une telle simplicité, une telle humilité aurait-on envie de dire, a quelque chose de frais. Et de très sympathique.
Long Range Driver, un poil plus rock, et le mini hit Take Back the Radio concluront impeccablement le set. Avant un rappel un poil en dessous… ce qui ne nous empêchera pas de sortir de la salle avec de grands sourires, et le sentiment bienheureux d’avoir écouté pendant un peu plus de 65 minutes de la musique… lumineuse.
Si Katy J Pearson ne deviendra probablement pas une star planétaire, elle pourrait bien, au fil du temps, rejoindre le club assez fermé des artistes en la compagnie desquels on se sent bien, et qu’on va voir sur scène chaque fois qu’ils passent près de chez nous !
Texte et photos : Eric Debarnot