Malgré une direction artistique généreuse et le plaisir des retrouvailles, Kaamelott – Deuxième Volet : Partie 1 peine à trouver sa quête. Prisonnier des doutes de son roi comme de ceux de son créateur, le film patine durant plus de deux heures, promettant l’aventure sans jamais l’accomplir.

Le cinéma français attend toujours ses locomotives en 2025, année très inquiétante en termes de box-office, et dans laquelle les grandes productions peinent à rassembler les foules. Astier et sa franchise culte Kaamelott pourrait bien déplacer les spectateurs, au vu du succès de son premier volet, qui avait relevé le défi d’une sortie de pandémie. Il s’agit donc, quatre ans après, de revenir là où les choses s’étaient arrêtées, et de relancer un univers déjà fortement étendu. Et c’est déjà là un premier défi que peine à relever ce nouvel opus, qui ne sait pas vraiment quelle direction donner aux protagonistes.
Toute la saga semble désormais phagocytée par le caractère cyclothymique de son roi, qui pourrait bien renvoyer à celui de son créateur. Dépressif paralysé par la désillusion, Arthur affirme qu’il n’a pas les épaules, et voit s’agiter autour de lui un monde qui peine à renaître de ses ruines. Cette absence de conviction est le sujet même d’un récit qui convoque tous les anciens, et tente de mettre en branle de nouvelles quêtes auxquelles personne ne croit vraiment, avant un discours fédérateur du roi qui disserte sur la notion d’aventures, et remet ainsi une pièce dans la machine. Une heure a passé, en dialogues interminables, en antijeu désormais traditionnel du protagoniste, et l’on commence à entrevoir une ébauche de direction.
Bien évidemment, les amateurs de l’univers de Kaamelott retrouveront avec plaisir la patte unique de son créateur, qui renoue instantanément avec la gouaille de dialogues acerbes, et la caractérisation rustique de ses inimitables personnages, Léodagan et Dame Séli en tête. Ajoutons à cela un travail soigné sur la direction artistique, de plantureux costumes et une variété dans les paysages (surlignée par quelques excès dans l’étalonnage d’une séquence à l’autre) : la surface, en somme.
Car pour le reste, le film a tout d’une coquille vide. Astier a beau lancer ses personnages, et une floppée de nouveaux venus difficiles à distinguer, sur les routes en mode Seigneur des anneaux, le souffle épique est sans cesse éventé. Par des rêves prémonitoires différant vers un futur peu excitant, , des répétitions constantes (l’épée dans le rocher, les refus d’Arthur avant son engagement), des dialogues collectifs montés avec une paresse qui tendent vers le théâtre filmé, des ellipses qui désactivent tout sens de la quête (le groupe des jeunes se rend compte que le voyage sera long, puis sont au segment suivant arrivés à destination). Au milieu de cette bande annonce continue d’événements à venir, ne consistant finalement qu’à faire tenir un laborieux récit choral où chaque personnage aurait sa partition, Astier dissémine des micro événements, qui eux-mêmes n’adviennent jamais : l’arc de Lancelot, redondant face à son père qui ne l’écoute pas, ou la vaine tentative d’envisager un héritier pour Arthur. L’absence de Perceval, imposée au réalisateur par son comédien, devient elle-même un motif narratif très révélateur, où l’on s’échine à le faire exister par ses lettres, comme si l’essentiel consistait à raviver la flamme perdue, par peur de décevoir les fans.
Le pire, dans ce surplace plombant, est sans doute de se dire qu’Astier y voit de la profondeur et de l’ambition : parce que son héros ne se laisse pas influencer par les codes traditionnels de la geste héroïque, et qu’il faut se projeter sur un récit au long cours, qui verra converger les trajectoires pour de flamboyantes aventures. Le pari est très risqué. Après avoir payé pour une bande-annonce de 140 minutes, pas sûr que le public ronge son frein pendant un an pour faire du volet suivant un triomphe à un roi asthénique et sa cohorte de bavards immobiles.
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Sergent Pepper
