A Tulsa, rien de nouveau. Les mêmes potes, les mêmes couples, de nouvelles embrouilles qu’on résout en dépit du bon sens, et le même sourire béat sur la tronche de Stallone qui n’en espérait sans doute pas autant de cette série qui ronronne comme un gros chat sur les genoux du téléspectateur.

Au bout de cette troisième saison, du trentième épisode d’une série qui, très loin du travail remarquable que livre la plupart du temps Taylor Sheridan (il suffit de penser à ce qu’il nous offre en parallèle avec son remarquable Landman pour réaliser… la différence !), ronronne tranquillement, voire paresseusement, le téléspectateur est en droit de se demander ce qu’il fait dans sa fauteuil, face à son écran. Et pourquoi il persévère…
… Car cette troisième saison, que l’on pouvait imaginer être celle du ressaisissement, n’est finalement que l’éternel déclinaison des mêmes qualités (limitées, mais appréciables) et défauts (plus nombreux, mais finalement pas si gênants) de Tulsa King. L’histoire semblait a priori partir dans de nouvelles directions, avec notre fine équipe de « ploucs maffieux » s’amourachant cette fois du business de la « booze » locale (pardon, du bourbon), et avec Dwight Manfredi forcé de collaborer avec les forces de l’ordre pour coffrer un dangereux fabricant de bombes. Mais on retombe vite dans la routine habituelle, dans le programme de cette drôle de « Dolce Vita » dans l’Oklahoma : on distribue des gnons, on butte même les « méchants » les plus antipathiques, on monte des coups tordus pour arnaquer la compétition, qui elle même monte des coups tordus pour avoir le dessus. Mais surtout, on regarde la vie du bon côté, entre copains et copines, on boit des verres, on rit de bêtises, on s’émeut devant les choses simples… sans que rien ne semble finalement jamais avoir de conséquences réellement funestes.
A Tulsa, rien de nouveau… Le script a toujours l’air d’avoir été écrit par un stagiaire pendant que Sheridan était au bar avec Stallone, il suffit d’ailleurs de regarder la scène d’attentat dans un hôtel au cours d’un gala pour mesurer le niveau d’amateurisme en la matière. La troupe d’acteurs, dans son ensemble, a toujours du mal à cacher qu’ils se marrent pendant le tournage et arrivent à peine, du coup, à paraître stressés quand les péripéties de leur guerre des gangs le nécessite. Et les couples amoureux (Dwight / Stallone et Margaret / Delany, Mitch / Hedlund et Cleo / Heathcote) ont l’air de l’être autant « dans la vraie vie » : ça s’appelle de l’alchimie, et ça fait toujours plaisir à voir à l’écran.
En fait, la seule chose qui ajoute une goutte de sérieux, presque de drame, dans The Tulsa King, c’est la présence dans cette saison de Robert Patrick, ex-T2000, qui compose un rôle délectable d’ordure complète, hargneux et cruel. Et qui porte la saison sur ses épaules de géant. Mais bon dieu, pourquoi est-ce qu’une tronche aussi patibulaire, d’où émane une aussi visible méchanceté, n’a pas été plus et mieux employée au cinéma, par de bons réalisateurs. Imaginez seulement ce qu’il aurait pu donner cher les frères Coen, par exemple !
Ceci dit, comment ne pas aimer aussi l’apparition surprise, dans les deux derniers épisodes, de l’ami Samuel L. Jackson, en délicieux tueur à gages old school et nostalgique, qui passe boire une bière avec ses potes. Et qu’importe s’il semble rejouer ici des scènes de Pulp Fiction adaptées pour les EHPAD ? C’est ce genre de choses qui fait que, en dépit du grand n’importe quoi du scénario de la série, il y a clairement un cœur qui bat dans Tulsa King…
Quant à la saison prochaine, qui devrait être l’avant-dernière, elle verra a priori le retour dans le jeu des mafieux new-yorkais. Est-ce que ce sera suffisant pour nous faire tenir devant l’écran ? Avec un verre de bourbon à la main, et en bonne compagnie sur le canapé, peut-être bien…
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Eric Debarnot
