5+5 = Hildebrandt

Aussi bavard que talentueux, le français Hildebrandt, auteur du très réussi « Les animals », s’est prêté au jeu du 5+5 avec un bel enthousiasme.

hildebrandt © Yann Orhan
© Yann Orhan

Découvert en cette rentrée 2016, celui qui été le chanteur pendant des années du groupe Coup D’Marron se lance dans une carrière solo avec un premier album (Les Animals) fort et débordant de sincérité paru sur le label At(h)ome. A cette occasion, on a demandé à Hildebrandt de nous parler de ses disques favoris… Et le Rochelais n’a fait les choses à moitié !

Novembre 2016

5 Disques du Moment :

Arman Melies – Vertigone
C’est l’album chanté en français que j’ai le plus écouté cette année ! Je ne connaissais de cet artiste que son nom qui évoque à la fois élégance passée et aventure artistique (folie inventive et lunaire de Melies, l’autre). C’est d’ailleurs par le biais de ses teasers (réalisés par lui-même) que j’ai découvert cet univers grandiose, élancé et quelque peu onirique. J’étais assez intrigué. Puis la réalisation d’Antoine Gaillet, les sons des synthés, les reverbs, le traitement global appliqué à ces chansons ambitieuses, me séduisaient ensuite. Mais surtout, c’est ce talent de la composition qui m’a touché. Ces mélodies magnifiques, souvent mélancoliques, toujours grandioses, m’ont transporté… Et l’album se laisse découvrir sur toute sa longueur, au delà des premiers élans on découvre aussi les lentes progressions de la fin de l’album et ses atmosphères soignées… Un album dense et cohérent comme ça, c’est rare !

H-Burns – Night Moves
Bon, l’album a déjà presque deux ans, ce n’est pas une nouveauté toute fraîche… Mais je suis tellement tombé fan de ces chansons que je me dois d’en parler ici. Il me faut d’abord préciser que, même si ça ne s’entend pas dans mes chansons, je suis par dessus tout un fan de musique folk américaine et des courants actuels qui en découlent. Si il m’arrive, en tant que musicien et mélomane, d’être transporté par mes émotions, c’est le plus souvent en parcourant les grands espaces et les mélodies caressantes de ces musiques…
En découvrant H-Burns (surtout avec cet album) j’ai retrouvé des émois d’adolescent… Je me suis retrouvé jeune fan de musique qui tripe sur les livrets de CD fraîchement achetés et qui se laisse rêver à des voyages intérieurs rien qu’avec une guitare en bois… « Three Chords and the truth » !
Ici j’ai tout aimé, la voix douce et pudique, tout en retenue, de Renaud, la prod de Rob Schapf (Elliott Smith, Beck), la variété des atmosphères, leur cohérence… et surtout, encore une fois, les mélodies ! Les mélodies sont criantes de vérité, d’évidence sans facilité excessive, de mélancolie légère, de rêverie nocturne… J’y entends une BO de film indé américain dans lequel on verrait tout, tous les sentiments humains, tous les paysages, toutes les illusions…

Midlake – The Courage of Others
Encore moins récent, cet album a déjà 6 ans ! Mais j’ai pas mal voyagé avec ça sur les oreilles ces derniers temps…
Cette fois ce que j’ai aimé réside dans le côté 70s et un rien british de ces chansons folk ultra élégantes. Les mélodies riches (mais jamais trop complexes), les harmonies vocales, les arrangements ambitieux et la flûte traversière nous emmènent au-delà des clichés folk américains qui ravissent nos oreilles d’enfants qui rêvent d’être cowboys… Et bien-sûr, ça regorge de bonnes chansons !

Vincent Delerm – Les Amants Parallèles
C’est au moment de me plonger un peu dans son dernier album (qui a l’air d’être un grand album) que j’ai redécouvert ce petit écrin d’intimité, de poésie moderne et de trouvailles musicales (tous les sons sont produits avec des pianos préparés). Une fois dépassés les clichés éculés et les préjugés un peu idiots du chanteur soit disant bobo etc, on découvre un mec qui a une grande exigence artistique tant dans sa démarche populaire que dans son approche de la poésie et de la musique. Quand on jette un oeil à toutes ses productions on entrevoit un artiste complet / entier, cohérent, toujours en recherche, à l’émotion simple et élégante.

Sufjan Stevens – Carrie & Lowell
Tout a été dit l’an dernier sur cet album qui a remporté tous les suffrages des fans de folk. Pour ma part, je l’ai pleinement apprécié un jour de septembre plein de soleil, en plein enregistrement de mon album, en errant dans le cimetière du Père Lachaise… C’était une période parsemée de doutes, de besoins de solitudes, de réflexions, de besoin de retrouver les miens malgré les envies de solitudes, de paradoxes (comme celui évoqué juste avant), d’envies et d’espoirs, d’impatiences… La rassurante beauté de cet album tombait à pic !!!

5 Disques pour toujours :

The Beatles – Abbey Road
Pour les deux faces soit-disant attribuées l’une à Mac Cartney et l’autre à Lennon, alors qu’il y a quand même deux chefs d’oeuvre de Harrison sur la face A (« Something » et « Here Comes the Sun »). Parce que c’est le plus bel album de séparation du monde. Parce que sans cet album, je n’aurais sans doute pas fait de musique. Parce que, pour ce qu’il savaient être leur dernier album ils sont retournés dans ce studio avec Georges Martin, à la maison ! Et parce que « Because » !

Leonard Cohen – Songs From a Room
Parce que c’est sans doute le seul album que je partage avec la culture musicale de mes parents, ils l’ont découvert au petit matin avec un ami DJ au début des années 70 alors qu’ils vivaient en caravane et que mon père a toujours appelé ça « les chansons du cow-boy ». Parce que la simplicité, l’élégance et la poésie ! Parce que la pochette est une des plus belles du monde et que la 4ème de couverture est une des plus belles du monde ! Parce qu’il n’a pas le Prix Nobel mais c’est pas grave…

Elliott Smith – Either / Or
Parce que c’est une de mes plus grosses émotions musicales, j’avais 22 ans, je vivais en Angleterre et je m’ennuyais par cet après-midi pluvieux dans ce grand hôtel où je travaillais… J’ai écouté l’album sans m’arrêter… La fille qui m’avait vendu l’album au Virgin de Birmingham était très belle. Parce que la grandeur de son talent de compositeur et de sa mélancolie !

Renaud – A La Belle de Mai
Parce que Renaud était l’un des seuls chanteurs français à avoir cette capacité à donner le sentiment de faire partie de la famille des gens qui aimaient ses chansons. Parce que cet album réunit tout ce qu’on aime vraiment chez lui avant que ce soit pathétique. Parce que « La médaille » est un véritable chef-d’oeuvre ! Parce que ma femme !

Pink Floyd – Wish you were here –
Parce que « Shine on you Crazy Diamond » est un voyage céleste ! Parce que « Wish you Were Here » est un voyage viscéral ! Parce-que enregistré aussi à Abbey Road et que Syd Barret est venu dans le studio, sans rien dire, assister à quelques sessions et qu’ils ne l’ont même pas reconnu et qu’ils en ont chialé…

Hildebrandt – Les Animals
Label : At(h)ome – 30 septembre 2016