Jean-Pierre Marielle nous a quitté, nom de Dieu d’bordel de merde !

Jean-Pierre Marielle nous a quitté mercredi 24 avril 2019, laissant derrière lui une galerie de personnages savoureux dont certains, pour des films de Joël Séria, resteront cultes à tout jamais : Charlie et ses deux nénettes mais surtout Les Galettes de Pont-Aven et …Comme la lune.

Au milieu des seventies, Joel Séria va tourner une série de trois films avec Jean-Pierre Marielle (Charlie et ses deux nénettes, Les Galettes de Pont-Aven et …Comme la lune) qui vont hisser l’acteur et son personnage de franchouillard paillard et sympathique au rang d’ icône un peu poisseuse du cinéma Français. C’est un certain cinéma Français qui s’efface avec la mort de ce monstre sacré. Un cinéma en liberté, loin du politiquement correct et des fausses pudeurs de nos dames-patronnesses contemporaines. Des oeuvres paillardes et libertaires, un mauvais goût salvateur et du cul, bordel, du cul !

Henri Serin, représentant en parapluie, s’ennuie dans sa petite vie étriquée de VRP de province ; et ce n’est pas les quelques aventures extra-conjugales qu’il s’octroie de temps en temps avec quelques rondes et molles commerçantes qui le font rêver le Riton. Oh ça, non ! Henri c’est en artiste qu’il se voit.
Marre des pébrocks !! Lui c’est Gauguin qu’il veut être !! Cézanne !! Courbet !! Et peindre des culs, Nom de dieu d’bordel de merde ! Des culs !

Après Charlie et ses deux nénettes, Marielle retrouve Séria, ou inversement. Ça sent bon les 70’s, tout ça. Un drôle de parfum dans l’air. Quelque chose de frais nous réveille les narines. Une sensation de liberté traverse ce film. Le sentiment que l’on peut faire ce que l’on a vraiment envie de faire. Sans entraves, sans barrières, sociales, sexuelles ou familiales. Ce petit côté « Ni Dieu, ni maître », qui lui fait tout envoyer en l’air, à notre Riton. Travail, famille, patrie, allez hop, à la poubelle ! Tout ça pour suivre un joli p’tit cul de Québécoise qui lui sourit.
Cette époque bénie où tout semblait encore possible. Où filer un grand coup de pompe dans le cul de son patron, de sa femme et de ses mômes pour aller faire le peintre dans un village de Bretagne et se nourrir exclusivement de chouchen pouvait être encore envisageable sans forcément passer pour la dernière des ordures.

Cet érotisme paillard et libertaire, bien de chez nous, parsème le film de ces scènes déshabillées « intelligentes ». Ces dialogues mémorables et travaillés à la perfection par la patte grivoise de ce Michel Audiard libertin, de cet Antoine Blondin de la fesse molle qu’est Seria, font encore mouche quarante ans plus tard.
Interprété avec tout le génie de Marielle, pouvant transformer les phrases les plus salaces en véritable poème courtois….Rhââ Ton Cul !….TON CUL !!…NOM DE DIEU D’ BORDEL DE MERDE ! ! !

 » Rhô.. Nom de dieu d’bordel de merde!  » : C’est bien là, la clé de l’oeuvre !!
Ce sera donc par cette petite phrase très expressive et pleine d’emphase, qu’Henri Serin (..Comme un s’rin !) renaîtra à la vie et oubliera un peu son existence monotone. C’est bien par cette expression outrancière qu’il se régénère le Riton. Mais il ne la sort pas n’importe quand sa jolie petite phrase.
Bien avant la peinture, bien avant les potes, le chouchen ou sa propre liberté, y a un truc qui le remet d’aplomb au Riton. Qui lui règle les thermostats. Qui lui ré-aimante la boussole. Riton ce qui lui refile le sourire, c’est avant tout : UN CUL !
Un beau, un généreux, un souriant, un superbe cul. Voilà ce qui le fait avancer au Riton, ce qui le maintient en vie.
Elle est là sa créativité, sa folie. Il est là son Bonheur. Elle est là sa douleur.

Les Galettes de Pont-Aven est sorti le 20 aout 1975 au cinéma.

Dernier film de la trilogie Seria / Marielle, …Comme la lune se présente comme une version Bigger and Louder du personnage outrancier de beauf attachant qu’incarne avec génie Jean-Pierre Marielle. Un bijou méconnu de ce cinéma Français des années 70, où ce vent de liberté qui soufflait encore n’allait pas tarder à se fracasser sur des 80’s beaucoup plus matérialistes. Une vraie tranche de rigolade 100% graisse saturée étalée sur du bon pain gavé de gluten. Les 70’s, quoi !

Jean-Pierre Marielle dans une robe de chambre à carreaux, promenant de bon matin un petit chien ridicule, et lui balançant quelques coups de pompes bien sentis au détour d’une poubelle.
Voilà comment commence ce film méconnu de Joel Séria, déjà coupable du cultissime galettes de Pont-Aven.

Et nous voilà partis pour une plongée abyssale dans la France profonde des 70’s. Époque bénie des cols pelle-à-tarte et des couleurs de fringues improbables;
où l’on suit le Divin Marielle, chantre de la beaufitude made in France, s’ébattre avec sa bouchère de maîtresse au son d’une Samba de supermarché, tenter une réconciliation femme/maîtresse autour d’un repas – surréaliste! – chez ses parents ou même partir en virée dans la bourgeoise Deauville dans un costume des plus ringards (même en 1977 !) que feu Joe Dassin n’aurait pas renié. Et tellement d’autres scènes hautement improbables mais diablement efficaces.

Une farce aussi ÉNORME que le cabotinage excessif mais totalement maîtrisé du grandiose Jean Pierre Marielle. L’acteur donnant ici (et peut-être encore plus que dans les Galettes) toute l’étendue de son génie comique, digne des plus grands noms de la comédie Italienne (Gassman,Sordi ou Manfredi) dont le film par son humour potache et paillard, sa façon de coller aux basques de son héros et de l’implanter dans la réalité sociale de son époque, fait clairement penser.

C’est avec l’oeil pétillant et un sourire satisfait que l’on éteint sa télé. Content d’avoir passer une excellente heure et demi devant une comédie aux dialogues ciselés dans le plus franchouillard des mauvais goûts, avec des répliques qui tapent fort sous la ceinture. Qui sous ses gros airs de grossièreté et de vulgarité assumés, distille ce doux et étrange parfum de bucolisme un peu poisseux, de poésie bancale.

Alors certes, ce n’est pas « LA » poésie façon Pléiade Ronsardienne, mais plutôt une « gaillardise » Rabelaisienne, une fable libertaire aux accents Villoniens..

Quelque chose de très Français, finalement…. Poil au gland !

…Comme la lune est sorti le 31 août 1977au cinéma.

RIP Jean-Pierre Marielle : 12/04/1932 – 24/04/2019

Renaud ZBN

One thought on “Jean-Pierre Marielle nous a quitté, nom de Dieu d’bordel de merde !

  1. « Rabelaisien » Marielle avec toutes ses étoiles * * * et inoubliable, mais le gardien d’immeuble du Rabelais de Montpellier lui ne l’a jamais été (il y a 20 ans ) n’a été que l’acteur d’une pièce d’extrême gauche, ou il jouait les mauvais scapins et troublions nuisibles couches tard de minuit jusqu’à cinq heures du matin chaque nuit pendant 3 mois soit 90 jours, musique à fond, cris , réveil de Dorian qui sonnait à minuit le dimanche etc…

    Bref, l’ENFER pour moi Du bruit et le froid au corps.

    Il y a 20 ans je pensais à Jean Pierre Marielle dans tous les matins du monde , quelques images dans mon esprit parce qu’il inspirait une sérénité que je retrouvais après des heures de peurs paniques que m’ avaient inspirés ces extrémistes de gauche, qui se cachaient, entre les couloirs communautaires du Rabelais et les sacs poubelles des ordures qu’ils ouvraient, à la recherche de + , afin de me nuire.

    Il y avait aussi une part de Mesmérisme derrière les murs, l’intelligence affligeante estudiantine d’extrème gauche qui blessait, comme pour me rappeler qu’il y a 20 ans je pensais à des artistes, des images de films francais, à Arzens.

    Un homme humain Marielle !

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