A défaut de pouvoir faire des concerts, Marietta viens de sortir un nouveau clip issu de son dernier – et remarquable – album Prazepam St, pour illustrer l’étonnant The Jordan Rules. Une belle occasion de lui demander de partager avec nous un 5 + 5… audacieux et radical.
« C’est l’histoire du sac poubelle dans lequel on fourre le butin volé, pour finir par se fourrer soi-même dans ledit sac. » Voilà ce que nous explique Marietta quand il s’agit de commenter The Jordan’s Rules. Et débrouillez-vous avec ça. Le morceau, puissant et fascinant en live quand les paroles proférées avec cette inhumaine conviction qui les transforme en mantra déviant entrent en collision avec les beats froids, méritait en effet un clip : mêlant usage de masques inquiétants, innocence gâchée et fausses franches rigolades dignes de nos réseaux sociaux dé-confinés, il trahit une forme de mauvais humour qui est l’élégance toxique du désespoir, mais qui poursuit également l’inépuisable « geste punk ». « Aujourd’hui comme avant hier nous appréhendons la pénétration du mythe via la violence molle d’un kebab tiède. » On n’aurait pas dit mieux.
5 disques du moment :
Oneohtrix Point Never – Magic
Un disque que j’écoute très souvent depuis sa sortie l’année dernière. Notamment le titre Lost But Never Alone que je me passais en boucle certains jours. Je suis très sensible à l’aspect protéiforme de la musique de cet artiste. Je suis souvent surpris, ou désarçonné et j’aime ça. De plus ses prods regorgent de détails cachés, j’adore.
Cindy Lee – What’s Tonight To Eternity
Un de mes disques préférés de 2020 également, et quelqu’un que j’aime beaucoup. Toujours touché par le romantisme fragile et légèrement suranné de ses chansons passées au hachoir dans un ampli twin reverb poussé au maximum.
Jim O’Rourke – Haflway To A Threeway
Un EP sorti en 1999 que j’ai redécouvert il y a pas longtemps. Magnifique et cruel. Une production pop folk prog très bien foutue (Jim O’Rourke est un excellent producteur en plus d’être un musicien hors pair), Quatre longues balades lumineuses à base de guitares picking contredites par des paroles inquiétantes et sombres en mode Lou Reed psychopathe.
The Hospitals – Hairdryer Peace
Là aussi, un disque (sorti en 2009) que j’ai redécouvert il y a peu. Il hibernait tranquillement dans ma discothèque avant de foutre le feu à mon appartement et dans ma tête. Ce type de prod apocalyptique et dégueulasse me manque aujourd’hui. Ça se passe de mots. Écoutez Getting Out Of Bed.
Scorpion Violente – Garçons Violente (uniquement disponible sur Bandcamp)
Six titres qui auraient du apparaître sur le BO du très beau film Les Garçons Sauvages de Bertrand Mandico. Malheureusement pour des histoires de timing ça n’a pas abouti. On découvre une facette beaucoup plus mélodique du groupe. Presque pop et mélancolique.
5 disques pour toujours :
Mulholland Drive – OST
Une des bandes originales que je préfère et le film d’un artiste que je considère comme mon mentor. Le thème d’Angelo Badalamenti continue de me filer la chair de poule à chaque écoute. La puissance sourde des drones, souffles, et autres textures sonores a marqué durablement mes tripes.
Country Teasers – Secret Weapon Revealed At Last Or Full Moon Empty Sportsbag
https://youtu.be/qwyjqsNJ-Gs
Une référence. Un disque libre et je-m’en-foutiste. Patchwork jouissif de sessions studios avortées et de démos débiles, réalisées par un Ben Wallers tantôt seul, tantôt accompagné par un groupes en débâcle. Ça sonne comme un unijambiste qui rampe, une bouteille de scotch à la main, un sourire sadique au coin des lèvres.
Bob Dylan – Pat Garrett & Billy The Kid (Soundtrack)
Disque parfait pour boire un café ou du whisky en regardant par la fenêtre, les pieds posés sur un chaise. Et puis c’est bien aussi quand Dylan ferme son clapet, non ?
The Velvet Underground – White Light/White Heat
Album parfait pour remettre les pendules à l’heure. La douceur d’une lame de couteau dans le bas du dos conjuguée à la caresse glaçante d’une langue inconnue dans ton oreille.
Suicide – Suicide
Album parfait pour remettre les pendules à l’heure, deuxième round. De la trépanation au napalm.