« Service après-mort » de Christophe Wojcik : Des mots chrysanthèmes

Antoine rédige des oraisons funèbres pour des personnes poussées dans les bras de la grande faucheuse par Mélina, une infirmière spécialisée dans l’ aide active à mourir. Christophe Wojcik nous offre avec son second roman, Service après-mort, une fable drolatique et finement écrite.

Christophe Wojcik
© Yann Montero

Antoine, ancienne plume d’un ministre très à l’aise dans les hommages pour personnalités canées, se reconvertit avec succès dans la rédaction d’oraisons funèbres sur mesure pour d’illustres inconnus. Deux ou trois infos sur le défunt par une famille éplorée ou un proche en rade d’inspiration et Antoine propose un éloge plus recyclable que l’Angelus. Comme la mort rend les gens formidables, même les pires saletés ont droit à un petit hommage, quitte à vanter des vertus ou des qualités qui font parfois douter de l’identité du cadavre dans le cercueil. Mince, je ne me serai pas trompé d’enterrement ? le pardon exige parfois certains trous de mémoire.

service-apres-mort-couvMélina, infirmière zélée aux petits soins palliatifs, pratique à l’occasion une petite aide active à mourir selon la nouvelle formule consacrée… mais pas par l’église. On va dire qu’elle précipite un peu certains patients désireux de mourir quand Le Styx est à sec ou Charon en grève, petite poussée sur le passage piéton de vie à trépas. Sur le sujet, les mots ont leur importance, préliminaire de langue de bois, entre quatre planches ou dans la cheminée.

Mélina fournit donc de la matière première à Antoine le nécrologue et comme 38 % des gens sont en couple avec une personne rencontrée sur leur lieu de travail, chabadabada sur requiem jusqu’à que la mort nous rapproche.

Service après-mort
 est une fable drolatique, finement écrite et très originale, au romantisme macabre qui fait la part belle aux sentiments entre les deux corbeaux… pardon tourtereaux, je mélange les volatiles.

Au-delà de l’au-delà, Christophe Wojcik n’attise aucune polémique, préfère rire de la mort pour chasser les idées noires, et son humour élégant, aux sonorités britanniques, ornemente davantage avec tendresse la question du deuil, vu du ciel, du coeur et du sourire en coin.
Le droit à mourir… de rire.

Olivier de Peco

Service après-mort
Roman de de Christophe Wojcik
Éditeur ‏: Héloïse d’Ormesson
160 pages – 17€
Date de parution : 25 janvier 2024

Extrait :
« Je me suis ensuite rendu sur mon lieu de travail où j’ai célébré des enterrements à la pelle: quatre papys, deux dames âgées, un jardinier tombé de son arbre, une cycliste fauchée par un bus, un ouvrier écrabouillé par un bulldozer sur un chantier, une jeune femme victime d’une méningite foudroyante, deux cancéreux en phase tellement terminale qu’ils en ont désormais terminé. » (page 134)

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