Imaginons, avec Scott Snyder et Tula Lotay, que Clide Barow eut été pilote et qu’il ait volé un avion avant de rencontrer sa Bonnie… leur histoire en aurait été différente.
Bix aspire à rejoindre les Barnstormers. Ces fous d’aviations, tous anciens pilotes de la première Guerre mondiale qui subliment leur stress post traumatique (pardonnez l’anachronisme, le syndrome est alors inconnu) en vivant de leur passion, proposent, tels des forains, des spectacles d’acrobaties aériennes et des baptêmes de l’air itinérants. Les plus chanceux, ceux qui auront survécu aux accidents, le métier est dangereux, trouveront plus tard des emplois à Hollywood. Le grand Howard Hawks célèbrera leurs souvenirs dans ses films.
Beau brun ténébreux, Bix a réussi à surmonter presque toutes ses peurs en se hissant dans un avion. Au hasard d’une étape, son Curtiss JN-4 bouscule une noce. Bix suscite la haine de Peyton Carlyle, le marié et potentat local, qui le fait passer à tabac et emprisonner. Le lendemain matin, aidé de Tillie, la jeune mariée, il parvient à s’enfuir. Le mari furibond engage un vieux détective de Pinkerton, pour ramener la fugitive et abattre celui qui est sensé censé l’avoir enlevée.
Une étape plus loin, Bix et Tillie se font inviter chez un inquiétant millionnaire. Trop d’argent rend fou. Le marié bafoué les surprend. Peyton décharge son arme et met le feu à la bâtisse. On relève des morts, il accuse les fugitifs. Les voici considérés par la presse américaine comme des ennemis publics. La chasse à l’homme est lancée. En expert accompli, l’as de Pinkerton nous confie sa théorie, qui fait froid dans le dos, d’une traque bien conduite dans un ouest américain encore sauvage.
Scott Snyder revisite le mythe de Bonnie & Clyde, en y associant un milliardaire arrogant, version « dark » de Gatsby le Magnifique. Son portrait, trop à charge, fragilise son scénario. Peyton n’en a cure et les cadavres s’accumulent.
Le dessin de Tula Lotay est original. Si ses décors sont souvent réduits à des couleurs numériques floutées, elle s’attarde sur les visages très réalistes de ses héros. Elle aime ce couple et magnifie leur romantisme tragique. Ils sont beaux et élégants. On les croirait tirés des superproductions de l’entre-deux-guerres ou, plus prosaïquement, d’un roman photo. Plus classique, son travail sur les biplans et les voitures est précis et sérieux. Ses avions volent bien.
La fin, que je ne raconterai pas, est réussie et l’avant-dernière séquence, celle de la fraternité des pilotes de chasse, m’a rappelé la conclusion du magnifique Porco Rosso. Je vous laisse, mon aéroplane m’attend.
Stéphane de Boysson
Barnstormers, voltige, amour et meurtre
Scénario : Scott Snyder
Dessin : Tula Lotay
Éditeur : Delcourt
160 pages – 17,50 €
Parution : 9 avril 2025
Barnstormers, voltige, amour et meurtre — Extrait :
