Miles Kane – Sunlight In The Shadows : un nouvel ami pour Miles Kane et sa musique brille à nouveau !

Sous la houlette – et avec la complicité amicale – de Dan Auerbach, Miles Kane signe avec Sunlight In The Shadows son album le plus réjouissant depuis longtemps : un bain de soleil seventies, entre T. Rex, Motown et énergie garage.

Miles Kane
Photo : James Kelly

D’un côté, vous avez Miles Kane, sur lequel on ne sait plus quoi dire, après vingt ans d’une carrière régulièrement brillante et souvent irritante, qui ne l’a pas vu atteindre la même célébrité que son vieux pote Alex Turner (alors que nous sommes nombreux à penser qu’il a un talent égal, sinon supérieur, à son complice des Last Shadow Puppets). Songwriter doué, excellent guitariste, chanteur à la voix singulière mais accrocheuse, Kane avait tout pour être une rock’n’roll star… si on était encore dans les années 60-70, qui sont clairement sa période de référence, et dont il n’est jamais vraiment sorti, entre son admiration pour John Lennon et son goût effréné pour Marc Bolan, pour ne citer que deux noms incontournables.

Sunlight In The ShadowsDe l’autre, il y a Dan Auerbach, qui a la chance d’avoir son label, Easy Eye Sound, et son studio pour l’occuper alors que les Black Keys vivent un très long – et triste – crash en termes de qualité de leur travail et de leur succès commercial (qui reste conséquent, entendons-nous bien). Auerbach est lui aussi l’un de ces nostalgiques, qui privilégient la vieille manière de faire de la musique – plutôt rêche, live en studio, avec un enregistrement analogique qui respecte la vérité et la chaleur du son. Il donne un énorme coup de pouce à une multitude de groupes ou d’artistes, mais il a l’indéniable défaut de rendre tout ce qu’il touche immédiatement reconnaissable, comme si une sorte de mini-greffe Black Keys était la condition contractuelle de sa coopération.

Sunlight in the Shadows – soit le sixième album solo de Miles Kane (on ne compte pas son travail avec The Last Shadow Puppets, The Rascals et autres) – est le résultat de la rencontre de Miles et de Dan. Et ce résultat est à la fois exactement ce qu’on pouvait en attendre, puisqu’on y entend de très bonnes chansons glam, northern soul, groovy et classic pop, qui sonnent exactement comme un assemblage de tout ce que les Black Keys ont pu faire pendant les dernières années (on a même l’impression d’entendre des cuivres quand il n’y en a pas !). Il semble d’ailleurs que se soit produit un coup de foudre immédiat entre les deux hommes. Miles : « Avec Dan, nous aimons mélanger T. Rex, la Motown et les Easybeats, et cet album en est le résultat. En discutant et en échangeant nos références, nous étions tellement proches que ça en devenait effrayant. » Dan : « J’ai eu l’impression de me faire un ami pour la vie. » Nous nous permettons – ce que nous évitons de faire normalement – de reproduire ces citations extraites du matériel promotionnel de l’album, parce que, finalement, tout est dit dans ces deux phrases capturées en interview : les influences musicales communes, purement et simplement retranscrites dans l’album, avec le savoir-faire indiscutable des deux (nouveaux) amis, mais aussi le plaisir pris en studio dans une atmosphère que l’on imagine très bien chaleureuse, enthousiaste et complice.

Il faut quand même aussi préciser qu’Auerbach n’a rien laissé au hasard pour garantir une réussite complète du disque : il est le co-auteur des chansons, mais il a aussi appelé à la rescousse des renforts dans leur écriture, dont Patrick Carney. Il a également renforcé le talent de guitariste de Miles par celui de gens comme Barrie Cadogan (Little Barrie) et Nick Bockrath (Cage the Elephant). Qu’est-ce qui pouvait mal se passer ?

Beaucoup de choses, en fait, parce qu’en faire trop – cumuler ceinture et bretelles pour que le pantalon tienne bien – est souvent une garantie d’indigestion ou de conformisme. Et Sunlight in the Shadows est bel et bien d’une évidence totale, qui peut prêter le flanc à toutes les critiques… Mais c’est aussi – et ce n’est certainement pas une surprise – l’album de Miles Kane le mieux accueilli par la critique depuis des lustres, aussi bien aux États-Unis qu’en Grande-Bretagne. Car c’est – et arrêtons de tourner autour du pot – un album brillant, mais surtout complètement jouissif, quasiment du début à la fin.

Car oui, les chansons sont simples, directes, parfaites mélodiquement, livrées avec une virtuosité et un enthousiasme de tous les instants, qui garantissent un plaisir immédiat – et, même s’il faudra attendre le verdict du passage du temps – persistant pour l’auditeur. Il faudrait citer ici chacun des douze titres de l’album, qui parcourent sans vergogne le spectre soul 60’s, garage psyché, pop classique et glam rock, passant d’un genre à l’autre avec une facilité éblouissante (peut-être que Sing a Song to Love est LE morceau dispensable de la tracklist, un peu trop lourd sur l’estomac ?), mais nous nous contenterons de mentionner l’ouverture pop, évidente et ample de Love Is Cruel, le beau single t-rexien et psyché qu’est Electric Flower, l’emblématique Sunlight in the Shadows (qui n’a pas donné son titre à l’album pour rien), le ralentissement du rythme sur un Without You jouant la corde sensible (bien cachée en général sous les airs bravaches de Miles), la cover superbement exécutée du Slow Death des inoubliables Flamin’ Groovies, et le final façon crooner – pas dégoulinant pour autant – de Walk On the Ocean.

Bon, les mauvaises têtes, dont nous sommes parfois, fronceront les sourcils sur le fait que ce disque aurait pu être écrit, enregistré et produit à l’identique il y a cinquante ans, mais au final, il n’y a ici aucun effet de nostalgie nauséabonde ou putassière. Juste le plaisir des musiciens. Et le nôtre, du coup.

Eric Debarnot

Miles Kane – Sunlight In The Shadows
Label : Easy Eye Sound
Date de sortie : 17 octobre 2025

 

 

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