« Run » de Blake Crouch : un thriller apocalyptique par l’auteur de Wayward Pines

Les éditions Gallmeister publient le premier roman de Blake Crouch, paru initialement en 2011. L’écrivain américain y imagine son pays en proie à une explosion de violence : une partie de la population, affectée par un mal étrange, n’a plus qu’une obsession : se débarrasser de l’autre. Haletant, Run est un page-turner efficace mais d’une très grande violence.

Crouch Blake© Matthew Staver couleur
Crouch Blake© Matthew Staver

Ces dernières années, les éditions Gallmeister se sont lancées avec succès dans la publication de l’œuvre de Blake Crouch, un auteur parfois comparé à Stephen King ou, plus souvent, à Michael Crichton. A l’instar de ce dernier, Crouch aime les récits spéculatifs, et c’est avec succès qu’il a fait paraître des romans souvent adaptés à l’écran. Ainsi, sa trilogie Wayward Pines est devenue une série sous la houlette de M. Night Shyamalan, Crouch s’est lui-même chargé de l’adaptation de son roman Dark Matter pour Apple TV, et les studios Amblin ont acheté les droits de son techno-thriller Upgrade. En attendant de découvrir cette nouvelle adaptation, son éditeur français poursuit la publication de son œuvre et nous propose donc de découvrir Run, le premier roman de Blake Crouch. Les traditionnels remerciements qui concluent l’ouvrage nous permettent d’apprendre que ce roman de 2011 a d’abord été autopublié, avant que Crouch ne soit repéré par un agent littéraire, et ne devienne un auteur de bestsellers. Œuvre d’un apprenti écrivain, Run souffre donc de quelques défauts de jeunesse, mais que son énergie et son sens du rythme finissent par faire oublier.

Run s’inscrit dans la longue tradition des romans qui racontent l’effondrement d’une nation, ici les Etats-Unis, en proie à un déferlement de violence inimaginable. Quelques jours seulement après l’apparition en pleine nuit d’une étrange lumière, certains habitants sont comme contaminés par une épidémie de rage et n’ont plus qu’une idée : tuer tous ceux qu’ils croisent. En quelques heures, le pays et ses institutions sont balayés par une vague de meurtres sauvages. Jack Colclough et sa famille vont devoir prendre la route et fuir pour échapper aux convois d’assassins sanguinaires que rien ne semble pouvoir arrêter.

Run est donc une sorte de « road novel » à travers des Etats-Unis en proie aux flammes et à l’ultra-violence, un pays traversé par une famille en crise qui va devoir se dépasser pour échapper aux meutes qui errent sur les routes à la recherche de leurs futures victimes.

Très efficace – Run est un livre qu’il est difficile de lâcher -, le premier roman de Blake Crouch repose toutefois sur un postulat de départ assez peu crédible. Lorsque l’origine de cette épidémie de violence est dévoilée (assez rapidement en fait), on a bien du mal à y croire. Pour autant, on l’accepte tant Blake Crouch se révèle habile dans les enchaînements des péripéties que la famille Colclough va devoir affronter. Pourtant, là encore, on pourrait reprocher à l’écrivain le recours aux archétypes dans la constitution de cette famille : des époux qui se sont éloignés et qui sont même au bord du divorce, mais qui vont finalement se retrouver dans l’adversité et s’unir pour protéger coûte que coûte leurs enfants. On a déjà vu ou lu cela bien des fois. Mais cette caractérisation assez simpliste des personnages n’empêche jamais le roman de fonctionner car Run est surtout construit sur une tension quasi permanente (même si Crouch ménage quelques pauses) : plus le récit se déploie et plus on se demande comment Jack et les siens vont parvenir à survivre (à la faim, à la soif, aux assassins qui les pourchassent, etc.).

Autrement dit, si Run et son style très visuel souffre de quelques défauts, le lecteur est finalement emporté par le sens du romanesque d’un écrivain en train de faire ses gammes. Et, bien évidemment, on ne peut s’empêcher de se dire, tout au long du livre, que ce Run pourrait lui aussi être le matériau idéal d’un prochain blockbuster.

Enfin, cette description d’une Amérique fracturée en deux se teinte en 2025 d’une dimension métaphorique qui ne faisait peut-être pas partie des intentions initiales de l’écrivain. Pour autant, le prologue et l’épilogue du livre témoignent sans doute des intentions de Crouch : sidérant et effrayant, son roman nous a finalement conté l’histoire d’une guerre civile. Et ça, hélas, ce n’est pas de la science-fiction…

Grégory Seyer

Run
Un roman de Blake Crouch
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Patrick Imbert
Editeur : Gallmeister
384 pages – 23,90 €
Date de parution : le 8 octobre 2025

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