Oneohtrix Point Never – Tranquilizer : Faux Calme

Inspiré par la disparition et la réapparition d’une archive musicale sur la toile, Oneohtrix Point Never construit avec Tranquilizer un album fait de contrastes et de ruptures. Avec un charme bricolé au parfum d’oeuvre de début de carrière.

oneohtrix point never
Oneohtrix Point Never, photo by Aidan Zamiri

On a personnellement découvert Oneohtrix Point Never par le cinéma. Plus précisément via sa participation à Good Time, film des frères Safdie appartenant au sous-genre inauguré par After Hours du « film où un type qui a un bon paquet de problèmes à régler sillonne New York en long, en large et en carré au cours d’une nuit ». Si l’on avait peu goûté la façon vue trop souvent d’utiliser la caméra à l’épaule pour produire un sentiment d’urgence, le score proposé par Daniel Lopatin était par son agressivité sonore raccord de l’esthétique du film.

Alors que la prestation de Timothée Chalamet dans Marty Supreme de Josh Safdie est déjà perçue à domicile comme oscarisable Outre-Atlantique, on attend avec curiosité le score composé par Oneohtrix Point Never pour le film. Pour le moment, on a ce Tranquilizer sorti sur Warp, label du compositeur depuis 2013 dont la branche cinéma a coproduit la série Adolescence.

Tranquilizer est un album inspiré par la découverte par Lopatin de la disparition d’une vaste archive de CD d’échantillons des années 90 de l’Internet Archive. Des échantillons qu’il comptait utiliser pour un projet musical.. et qui sont réapparus. Il a voulu faire un disque à partir de cela, à partir de quelque chose de proche de l’idée d’impermanence. Le reflet d’une époque où tout est archivé mais tout peut disparaître… pour ressurgir.

Ce projet électronique n’est pas sans lien en apparence avec le concept de musique Ambient théorisé par Brian Eno. Sauf que plutôt qu’une musique pour aéroports ce serait du calme pas tout à fait tranquille, dans lequel le piano et les nappes atmosphériques de synthétiseur cohabitent avec des éléments sonores empêchant l’abandon total.

La perturbation vient d’un arsenal sonore qui, tel la flûte de pan électronique, présentait un gros danger de « c’est daté mais c’est employé au second degré »… et qui l’évite toujours. Des bruitages façon vieux jeu vidéo vont parasiter des titres dont le début incite à l’abandon. Un piano fait face à des bruits style 33 tours usé ou à des sons plus robotiques sur Fear of Symmetry. Un côté assumant de façon visible les ruptures, les contrastes donnant à l’album un petit charme bricolé.

Chacun brodera sur ce que l’album pourrait raconter d’une vie urbaine contemporaine qui mélangerait routine et mal-être. Ou fabriquer un récit à partir des titres de ses morceaux. Mais le côté à la fois non énervé et malaisant de ce Tranquilizer lui donne paradoxalement une force d’attraction.

Ordell Robbie

Oneohtrix Point Never – Tranquilizer
Label : Warp
Date de parution : 21 novembre 2025

 

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