Fausse comédie et vrai labyrinthe psychanalytique, Poupée Russe s’avère plutôt une bonne surprise… pourvu qu’on ait envie de se prendre au jeu après un démarrage laborieux…
Sur le principe de Un Jour sans Fin, Poupée Russe, la série de 8 épisodes de 30 minutes créée par Amy Poehler commence plutôt mal. Même si l’abattage de Natasha Lyonne, que l’on avait déjà pu apprécier dans Orange is the New Black, dans le rôle d’une trentenaire déjantée et suicidaire fait d’abord son petit effet, on se fatigue vite au bout de deux épisodes de ces boucles temporelles qui semblent rapidement bien stériles, et ne s’avèrent ni touchantes, ni amusantes (… à la différence bien sûr de son inimitable modèle).
Cela vaut néanmoins la peine de s’accrocher jusqu’au « mini-séisme scénaristique » de la fin du troisième épisode, qui propulse la série vers autre chose de beaucoup plus conceptuel et finalement passionnant. On comprendra a posteriori la nécessité de cette longue introduction avant de passer « aux choses sérieuses », puisque la fiction – addictive au point que le binge watching s’impose naturellement – se nourrit de tout ce qu’on aura vu auparavant sans trop y prêter attention. Poupée Russe se révèle contre toute attente assez malin dans sa construction jusqu’à un dernier épisode stressant et libérateur… même si l’on n’évite pas la morale très américaine de l’acceptation de soi et de la nécessité de l’attention aux autres ! On préférera donc se souvenir de ce Poupée Russe pour la force de son thème psychanalytique (qui nous vaut en outre une belle apparition de Chloe Sevigny), et pour sa capacité à créer de surprenantes ambiances anxiogènes dans sa toute dernière partie, qui montre un monde ravagé par l’entropie et par la disparition progressive de ses habitants.
Une réussite, certes mineure, mais quand même indéniable, parmi la production de séries originales et décalées de la maison Netflix.
Eric Debarnot