Sensation récente sur Netflix – même si le qualificatif paraît galvaudé tellement chaque série hebdomadaire dite « sensation » chasse la précédente tous les trois jours -, Hostage entend reprendre les codes de la série policière façon 24 heures chrono en les réinjectant dans une politique-fiction ancrée dans l’actualité, mais dont les ressorts scénaristiques peinent à convaincre. Assez efficace par instants, mais médiocre au final.

Qu’attendre aujourd’hui d’une série de la plus grande plateforme actuelle ? Plus grand chose, à vrai dire, même si cela peut donner quelques excellentes surprises récentes (Arcane, Ripley, Black Mirror) mais sûrement pas cet Hostage, produit formaté à première vue de bonne facture. Le problème vient surtout de l’approche qu’en aura le spectateur, réduit à l’état de consommateur de séries qui ne vont pas le bousculer, ni le faire réfléchir puissamment, mais qui lui permettront de passer une fin d’après-midi et une soirée de dimanche, lové dans son canapé, à oublier la déprime hebdomadaire d’avant la reprise de la semaine.
Encore une fois, sur le papier, pourquoi pas ? Une première ministre britannique, fraîchement nommée, voit son maintien en poste malmené par la prise d’otage de son mari, bénévole chez MSF et en mission en Guyane Française, tandis que la présidente (fictive) de la France, tendance Marine le Pen, est invitée en terre britannique pour négocier sur des problèmes frontaliers socio-économiques. Suranne Jones (qu’on a adoré dans Dr Foster et Vigil) et Julie Delpy en face-à-face diplomatique, pourquoi pas, aussi ? Sauf que rien ne va…
Les cinq épisodes menés tambour battant – afin que l’on puisse aisément le binge-watcher sans trop s’emmerder – sont cependant truffés d’incohérences ou de fausses bonnes idées qui mettent à mal la tension scénaristique de départ. Un mari de premier ministre en médecin humanitaire, bon… britannique œuvrant en Guyane Française… mouais… enlevé par des terroristes qui ne demandent qu’une démission en échange… euh, ok… la France impliquée malgré elle dans cet incident mais qui ne peut aider car la présidente est victime d’un chantage à la sextape… là, on sent que ça part dans le n’importe quoi.
Et c’est dommage. Car Matt Charmann, plutôt spécialiste d’espionnage (Le pont des espions de Spielberg), aurait pu largement profiter des secousses politiques actuelles. La montée du réarmement des pays européens face à la menace russe, la question migratoire entre nos deux pays séparés d’une mer qui fait débat, l’inclinaison très extrême-droite de la cheffe d’état français, le Brexit… tout aurait pu donner un thriller politique qui ose enfin jouer avec les peurs contemporaines et ausculter de l’intérieur les rouages sombres des diplomaties. Las ! On en vient à s’échanger des migrants contre des médicaments français – oui, car dans Hostage, le Royaume-Uni est en pénurie de médocs, et on veut bien en renvoyer s’ils nous récupèrent des réfugiés qui attendent sur le rivage de Calais…
Ajoutons à cela des seconds rôles qui font office de tapisseries (la fille du couple-héros, insupportable ; l’assistante de Julie Delpy, notre petite gloire musicale outre-Manche Jehnny Beth qu’on a plaisir à retrouver ici, mais qui garde une portion congrue dans un rôle peu crédible), un essai de relance de l’intrigue aux deux-tiers qui surprend un peu mais qui laisse place ensuite à encore plus d’incohérences… Bref, tout cela est bien regrettable, surtout que l’ensemble reste efficace.
Même si on a déjà vu ce type de choses maintes et maintes fois, le spectateur à tendance pop-corn que nous pouvons tous être saura se contenter de cette mini-série plutôt haletante, qui manie savoir-faire à la sauce britannique avec des péripéties en nombre suffisant pour maintenir l’attention. Rien de plus.
C’est déjà pas mal ? A vous de voir…