Portée par Hamish Linklater et son personnage fascinant, la nouvelle saison de Gen V gagne en maturité, au prix d’un final décevant et d’un sentiment persistant : celui de n’être qu’une rampe de lancement vers The Boys 5

Après une première saison pas au niveau de The Boys, mais quand même très regardable du fait du parallèle – bien connu depuis le premier Spider-Man de Sam Raimi – entre super-pouvoirs et effervescence hormonale chez les teenagers, Gen V revient deux ans plus tard avec huit nouveaux épisodes bien plus sombres (et donc, inévitablement, bien moins drôles), avec de nouveaux atouts mais également de nouvelles faiblesses.
Bien reçue par la critique et le public outre-Atlantique, cette seconde saison souffre évidemment de la disparition de l’un de ses personnages les plus charismatiques, André. Et « faire le deuil » de ce « héros » bien-aimé est l’une des épreuves qu’affrontent plusieurs protagonistes, dont son père, Polarity, qui devient un personnage clé. On apprécie le fait que – problème classique avec les séries consacrées à de « jeunes adultes » – tout le monde a pris deux ans de plus, élevant la série au-dessus des problèmes d’ados, qui passent désormais au second plan. Même si Gen V manque toujours de l’agressivité politique (anti-républicaine) de The Boys, on pourra lire derrière la nouvelle intrigue la critique de cette folie croissante, aux États-Unis, de la recherche d’un pouvoir toujours plus incontrôlable, plus inhumain, assorti d’un mépris absolu pour les plus faibles… soit quand même une parabole transparente de la nouvelle société « trumpienne » !
Alors que Marie Moreau gagne de la profondeur (Jaz Sinclair est ici bien plus charismatique), cette saison convainc avant tout grâce à la présence d’un antagoniste séduisant et glaçant, un méchant d’anthologie : Hamish Linklater, qu’on avait déjà remarqué dans le Midnight Mass de Flanagan, incarne un Cypher qui dévore littéralement l’écran. Et le retournement de l’avant-dernier épisode enrichit encore le personnage et l’intérêt que l’on ressent pour lui.
D’un autre côté, le rythme de la série, qui n’a jamais été son point fort, reste très inégal : on enchaîne sans cesse des moments captivants avec des passages franchement creux, où l’on est devant un objet sériel qui n’arrive pas à trouver réellement son identité. Et ce problème devient criant dans le dernier épisode, qui s’avère une grosse déception : un combat final qui se dégonfle comme une baudruche, à la fois terriblement peu cohérent et guère spectaculaire, mais surtout une dernière scène qui dévoile l’objectif réel de la saison : déboucher directement, avec un casting mixant celui de Gen V et celui de The Boys, sur la prochaine saison de cette dernière. Même si on s’en doutait après le visionnage de la première saison, et qu’à l’époque, on appelait même de nos vœux l’hybridation entre les deux séries, cette confirmation que l’intention de Prime était de créer, autour de l’une de ses séries phares, un « univers étendu », qui soit capable d’attirer de nouveaux téléspectateurs, s’avère dommageable… Car c’est bien au détriment de l’efficacité de cette saison de Gen V qu’elle se manifeste !
Inutile de dire que, si les fans de séries ultra-violentes et satiriques trouveront ici encore de bonnes raisons de se réjouir, avec un humour pipi-caca régressif qui équilibre les excès « gore », le reste des téléspectateurs risque quand même d’en sortir déçu.
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Eric Debarnot
