[Live Report] A.A. Williams au Backstage By The Mill : beauté funèbre

A.A. Williams se fond dans l’obscurité, mais sa voix transperce les ténèbres. Poursuivant tranquillement son ascension, la jeune femme accompagnée de son groupe nous conviait jeudi soir à une célébration de son death gospel envoûtant.

A.A. Williams
A.A. Williams au Backstage By The Mill

Quoi de mieux que de s’engouffrer au fond du Backstage, tout de noir vêtu, alors que tous les Parisiens se ruent en terrasse pour profiter du soleil ? Certes, la photosynthèse était attirante, mais la tentation était forte d’aller découvrir en live A.A. Williams, pour la première fois en tête d’affiche à Paris après son passage avec MONO en septembre dernier. Entre temps, son troisième album, As The Moon Rests, est sorti, et a confirmé les espoirs que l’on porte sur la chanteuse depuis ses débuts.

A.A. WilliamsAprès une rapide première partie assurée par Limbes, le projet de black metal d’un seul homme, A.A. Williams a pris place sur la scène du Backstage à 21h, en compagnie de trois musiciens. Le calme est monacal dans la salle, l’attention est unanime face à la jeune femme aux cheveux noirs de jais qui, bien vite et sans effort, impose son aura sur l’assemblée de sa voix éthérée, aussi si ce n’est plus envoûtante que sur ses albums. Si l’on peut lui reprocher quelques longueurs dispensables en studio, A.A. Williams signe en revanche un set live impeccable, offrant généreusement les plus belles échappées de son dernier album, du cathartique Evaporate au tortueux For Nothing, sans pour autant en oublier les magnifiques envolées de titres plus anciens comme Control ou Melt.

A.A. Williams qualifie sa musique de « death gospel », et c’est aussi la description que l’on pourrait donner à la performance qu’elle choisit de nous offrir en live. Sa voix s’épanouit dans les hauteurs, mais honore les abîmes d’une musique contemplative au possible. Le temps se met à ralentir, alors que dérivent les guitares, tonnent les percussions et divaguent les esprits. A la droite de la jeune femme, le guitariste et claviériste demeure un élément indispensable à la beauté du set, assurant les solos avec une puissance remarquable. Et c’est bien lorsque s’embrasent les guitares sur de longues envolées, presque trop rares, que se tendent au diapason le cœur des initiés rassemblés à l’autel d’A.A. Williams.

A.A. WilliamsA l’aune de l’une de ces explosions attendues, la chanteuse s’arrête net pour s’inquiéter d’une personne ne se sentant pas bien au premier rang. Si ses interventions envers le public s’étaient jusqu’alors faites discrètes, elle démontre là une attention et une douceur à toute épreuve, rompant avec l’image taciturne que l’on se fait des musiciens de sa trempe. Elle ne reprend le concert qu’après s’être assurée que tout le monde allait bien, et si l’on aura manqué l’ascension de Pristine, on ne peut qu’apprécier la tendresse de cette femme, si impressionnante d’humilité et d’authenticité. Reprenant avec la douceur en acoustique de Ruin, A.A. Williams ne manque pas de nous offrir une dernière incursion dans les limbes de son monde éthéré en interprétant Belong et As the Moon Rests. Respectivement issus de son premier EP et de son dernier album, ces deux derniers titres sublimes démontrent la qualité de l’artiste à conserver, si ce n’est embellir la qualité évidente de productions qui se ressemblent souvent, mais ne se heurtent jamais.

A.A. Williams continue de fasciner. Associant chant aérien et guitares abrasives à la perfection, elle guide l’auditeur dans le noir avec une formule tout à fait envoûtante et décidément aussi efficace en studio que sur scène.

Texte et photos : Marion des Forts