L’Olympia sold out accueille les Anglaises de Wet Leg pour confirmer leur succès grandissant dans l’Hexagone. A la fin du set, il n’y a plus de doute : Wet Leg n’est pas un feu de paille, et il faudra s’habituer à la bouille de sa chanteuse Rhian Teasdale.

Il se passe indéniablement quelque chose avec Wet Leg. Le groupe s’est fait connaitre en 2023 principalement par un single très malin, Chaise Longue, qui s’est avéré être un joli succès indé, et avec un album qui pour le coup était un peu inégal, mais gorgé néanmoins de tubes pop imparables. Largement de quoi anticiper un effet de mode et une hype qui pouvait s’éteindre rapidement. Le deuxième album était attendu au tournant, et il a surpris. Porté lui aussi par un tube évident, mangetout, il est nettement plus solide, et a permis au groupe d’amplifier significativement son audience, la preuve en étant la difficulté pour les étourdis de trouver des places pour ces deux soirées complètes à l’Olympia. Cette montée en puissance s’est accompagnée de celle de Rhian Teasdale qui a pris tourte la lumière sur elle. Le groupe est toujours mené par le duo Rhian Teasdale/Hester Chambers, mais cette dernière a décidé de rester dans l’ombre et de laisser sa comparse occuper le devant de la scène, comme sur la pochette de moisturizer. Les échos de la première date parisienne sont excellents, allons donc voir le phénomène de plus près pour vérifier si ces titres malins passent ou non sans encombre le test de la scène.
Mais pour cela, il faut déjà passer l’épreuve de la première partie, et ce n’est pas facile puis qu’il s’agit de Faux Real, un duo franco-américain composé de Elliott et Virgile Arndt, deux frères qui font dans une sorte d’electro pop funk avec moultes synthés, kitch revendiqué, et shows déjantés du fait de leurs chorégraphies complètement déconnantes et étranges. A priori pas grand-chose à voir avec la tête d’affiche donc. C’est musicalement tellement à l’opposé de mes goûts que j’ai l’impression que c’est une provocation pour tester mon empathie. Mais, s’il faut leur reconnaître un point commun avec Wet Leg, c’est finalement leur coté fun. Habillés tout en blanc, bien entendu sans aucun musicien pour les accompagner, une bande instrumentale suffisant, ils se retrouvent dans la fosse au bout de trois minutes (et y retourneront à la fin), et ils mettent une sacrée ambiance avec leur loufoquerie. Cela serait compliqué de supporter Faux Real trop longtemps, mais la demi-heure est passée vite. Inutile néanmoins de me proposer d’aller les voir en tête d’affiche.
Après les 20 minutes habituelles d’entracte , c’est à un peu plus de 21h que Wet Leg investit la scène. Comme prévu, Hester Chambers se tient au fond, et Rhian Teasdale investit le centre, alors que résonnent les premières notes de catch these fists qui ouvre le concert. Le son est énorme et le groupe joue sous une épaisse fumée, ce qui nous empêche de voir le batteur, mais doit satisfaire Hester qui est, pour le coup, bien planquée. Nous distinguons donc surtout des silhouettes devant lesquelles se détache Rhian. D’emblée c’est l’assurance du groupe qui saute aux yeux : Rhian a une présence folle, et il n’y a que Shirley Manson à dégager actuellement un tel charisme, qu’elle déploie plus en chantant qu’en s’adressant au public. Le musculeux bassiste Ellis Durand se fait bien entendre, et sera pendant toute la soirée l’un des principaux artisans du son.
Vont suivre trois titres du premier album, le tube Wet Dream, Oh No et Supermarket, moins convaincants à mon goût et qui tendraient à confirmer la moindre qualité de ce premier effort : c’est donc un léger ventre mou du concert qui arrive plus tôt que d’habitude, mais qui va être oublié dès liquidize qui est une composition remarquable, très indie rock 90’s à la Breeders/Pixies. Rhian va confirmer sa métamorphose en bête de scène sur le non moins parfait jennifer’s body, et Durand illuminera le très court mais méga efficace Being in Love, ainsi que Pond Song. Pendant l’enchainement don’t speak/davina mc call, nous comprenons que c’est probablement la dernière fois que nous voyons le groupe dans une salle comme l’Olympia : le passage au Zenith se rapproche. Un mot sur le public, un joli mix de cinquantenaires fans d’indie rock et beaucoup de jeunes qui chantent, ce qui fait toujours plaisir quand il s’agit de rock à guitares.
Le son va singulièrement se durcir pour la fin de concert, et un titre comme pillow talk voir le groupe dépasser l’indie rock pour aller vers quelque chose à la limite du stoner. A l’heure où les Queens of the Stone Age font des tournées acoustiques, Wet Leg reprendrait-il le flambeau ? C’est assurément exagéré, mais ce titre live montre bien les possibilités qui s’ouvrent au groupe pour le futur. Nous aurons la même impression avec un Angelica bien agressif, suivant u and me at home, qui confirme sur scène tout le bien que nous en pensons, le refrain est nickel en tout cas pour chanter tous ensemble. Le groupe a gardé naturellement pour la fin Chaise Longue et mangetout, encadrant CPR. Rien à dire, mangetout est un tube irrésistible, et la parfaite conclusion d’un concert qui aura répondu aux attentes.
1h10, 19 titres, Wet Leg aura quasiment interprété l’intégralité de sa discographie, sans rappel, avec une attitude et une énergie qui auront séduit le public. Rien de révolutionnaire bien sûr, ce n’est pas ce que nous attendions, mais oui il faudra compter avec Wet Leg dans les prochaines années. Le groupe va avoir la pression pour profiter de l’élan acquis, et ne pas attendre trois ans pour composer le petit troisième.
NB : Pour ceux qui voudraient prolonger le moment, le groupe était également ce jeudi l’invité de Michka Assayas pour un Very Bad Trip qui lui était consacré.
Faux Real : ![]()
Wet Leg : ![]()
Laurent Fegly
Photos : Jean Ox (merci à lui !)
