Boy A

affiche_10.jpgQui dit cinéma venu d’Angleterre dit souvent films sociaux, ancrés dans la réalité la plus noire, sinon la plus sordide. Les années Tchatcher sont passées par là  et avec elles on a pu assister au retentissement de réalisateurs comme Ken Loach et Mike Leigh, véritables figures de proue d’un mouvement qui s’évertue, avec talent et constance, à  mettre en scène la classe ouvrière tout en lui offrant une attention pleine de dignité et dénuée – pas toujours – de misérabilisme. Loin d’autres cinéastes britanniques, tels Stephen Frears et Danny Boyle, partis chercher le succès hors de leurs frontières, le nouveau venu John Crowley, dont Boy A est le deuxième long-métrage, paraît occuper une autre place en s’attachant à  la trajectoire d’un jeune homme qui pourrait prendre place n’importe où ailleurs.

Il convient néanmoins de demeurer sibyllin au sujet de l’intrigue de Boy A, dont les divers éléments nous sont livrés au fur et à  mesure. Juste pourra-t-on dire qu’elle s’articule autour d’un garçon nommé Jack. Une identité qu’il se choisit lui-même à  sa sortie de prison, sous les conseils de son éducateur chargé de l’épauler dans la construction d’une seconde vie qui, du coup, s’apparente davantage à  une seconde chance. Le passé de Jack – Eric dans son ancienne existence – est douloureux et terrible. Douloureux parce que solitaire entre une mère mourante et des collégiens qui le tabassent. Terrible car l’ami qu’il se trouve alors va provoquer l’acte irrémédiable qui le conduira derrière les barreaux. Une enfance malheureuse que John Crowley rappelle et évoque à  coup de flash-back insistants et trop explicatifs.

Une attitude qui, au demeurant, contraste avec le reste du film, qui privilégie le recours à  certaines ellipses, notamment au niveau de la lumière très blanche et l’usage de contours flous, conférant un aspect étrange, sinon irréel, à  Boy A et l’éloignant par la même occasion d’une emprise trop sociale. Dans sa nouvelle vie, Jack fait ainsi la connaissance d’une fille généreuse, tant physiquement qu’humainement. Les scènes entre Jack et Michelle sont traitées avec douceur et pudeur, tout en nous faisant pénétrer au coeur de cette relation intense.

En déviant l’axe principal sur un personnage secondaire, mais pourtant fondamental, ce qui permet à  John Crowley d’établir des parallèles lourds de sens, Boy A fait preuve d’une certaine complexité dans sa construction et réfléchit aussi sur le poids de la famille et du passé. Si Boy A n’évite pas quelques longueurs – la longue scène de la sortie nocturne – et quelques plans par trop démonstratifs, il retient avant tout l’attention par la qualité de son interprétation – les jeunes comédiens sont convaincants – et la bonne tenue de sa mise en scène qui déjoue habilement les tentations misérabilistes et lacrymales. Le film joue d’abord sur l’émotion mais aussi sur la retenue, ; la combinaison des deux laisse Boy A se voir avec plaisir.

Patrick Braganti

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Boy A
Film britannique de John Crowley
Genre : Drame
Durée : 1h40
Sortie : 25 Février 2009
Avec Andrew Garfield, Peter Mullan, Katie Lyons

La bande-annonce :

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