Pour la peau – Emmanuelle Richard

Elle l’a dans la peau. Même si elle a parfois envie de lui faire la peau. Une histoire d’amour, de passion, de chair qui remue les entrailles.

ERichard

D’entrée de jeu, le lecteur connaît la fin de l’histoire. « Terminer ce livre. Finir de déposer pour oublier ». Reste alors plus qu’à remonter le fil de cette rencontre/passion/fin de l’amour. Emmanuelle Richard prend son stylo comme le chirurgien son scalpel et décortique. Cherche des ultimes traces. Demande des preuves. Cet homme-là a-t-il vraiment existé ? Oui, mais « la dernière fois qu’on est heureux avec quelqu’un, on ne le sait pas ». Et c’est bien cela le plus difficile à accepter… Hier encore, il m’aimait. Enfin, il me le disait. Comment passe-t-on de l’amour à la haine, pire à l’indifférence ? L’auteure se remémore chaque phrase, analyse chaque mot et relit sans cesse les textos échangés. Oui parce que cette histoire est aussi un conte moderne 2.0. L’amour à l’heure contemporaine passe par ce lien qui paraît si infime mais qui revêt tellement d’importance. La possibilité d’être avec l’autre à n’importe quel moment. Mais le risque aussi qu’il vous laisse sans réponse, imaginant alors les pires scenarii.

PourLaPeau« Pour la peau » ne raconte pas un amour édulcoré. Le choix de ce titre n’est pas anodin. Le sexe y a sa part. Emmanuelle Richard le raconte avec délicatesse. Pas de trash mais pour autant du cash ! « Je n’ai jamais compris pourquoi dans le sexe qui me paraît un territoire complètement à part entre personnes consentantes il y aurait des choses considérées comme dégradantes. » Les deux protagonistes s’aiment, se prennent, s’entraînent l’un l’autre vers leur fin. Le sexe comme une drogue. Difficile de décrocher du corps de l’être aimé. C’est peut-être d’ailleurs la pire addiction. L’histoire racontée par l’auteure est donc aussi cette désintoxication-là. Comment sauver sa peau. Alors même qu’on l’a profondément dans la peau.

Totalement autobiographique, Emmanuelle Richard a mis ses tripes dans ce livre. Et cela se ressent. Sensualité, vitalité et surtout virtuosité. Tout y est. Il y a du Annie Ernaux. Il y a aussi un peu de Roland Barthes, période « Fragments d’un discours amoureux ». Il y a également du Dominique A dont le titre « Dans la peau » est emprunté à l’une de ses chansons. « Ta patience infinie / Ses « non, « oui », « pas ici » / Un jour ça s’est passé / Elle voulait dans ta chambre / Et tout a bien été » chantait l’artiste en 2011. Tout n’a pas si bien été pour la romancière mais son livre nous a fait chavirer.

Delphine Blanchard

Pour la peau
Emmanuelle Richard
Éditeur : L’Olivier
224 pages, 18 €
Date de parution : janvier 2016