Neuvième film du réalisateur Sébastien Betbeder, L’Incroyable Femme des neiges peine à convaincre, perdant le spectateur dans les courants contraires d’une comédie égarée perdue entre les montagnes jurassiennes et la neige du Groenland.

Coline (Blanche Gardin) est une exploratrice de l’arctique tout juste licenciée et au bord de la dépression, qui revient dans sa maison familiale au pied du massif du Jura. Elle y est accueillie par ses frères Basile (Philippe Katerine) et Lolo (Bastien Bouillon), qui malgré leurs efforts ne parviennent pas à lui faire remonter la pente. Une nuit de randonnée, elle disparaît sans laisser de traces. Présumée morte, elle est en réalité partie au Groenland, accueillie par une communauté inuit dans une petite ville isolée. Là, elle rédige ses Mémoires en paix, jusqu’à ce qu’une visite médicale lui diagnostique un cancer en phase terminale.
On ne compte plus les scénarios qui, ces dernières années, racontent tous peu ou prou la même histoire : le personnage principal, venu de la ville, retourne dans le patelin ou le village de son enfance à la faveur d’une crise existentielle. Il y trouve l’amour, l’amitié ou les ressources pour se reconstruire et aller de l’avant. C’est cette trajectoire éculée de résilience qu’a voulu reprendre à son compte le réalisateur Sébastien Betbeder, avec l’ambition affichée de l’emmener ailleurs, dans une comédie qui se voudrait caustique et spirituelle.
Le problème, plus que dommageable, est que le film ne semble jamais trouver le bon dosage entre ses deux versants, comique et tragique. Cela provoque un décalage constant dans le rythme du film, qui affecte les instants de comédie qui pour la plupart, tombent à plat. On peut citer à ce propos l’apparition surprise d’Aymeric Lompret en policier vindicatif, dont le registre de jeu n’est pas du tout en phase avec celui de la scène.
Les acteurs de manière générale, semblent se débattre avec des dialogues sur-écrits qui sonnent artificiels ou même faux, et qui les restreignent grandement : Bastien Bouillon a bien peu de choses à défendre, et Philippe Katherine ne trouve nulle part où exprimer la poésie de sa présence, si bien exploitée chez Sophie Letourneur (Voyages en Italie, L’Aventura) ou même chez Gilles Lellouche (Le Grand Bain). Blanche Gardin s’en sort mieux dans un rôle écrit sur mesure, qui toutefois ne sort jamais des rails de son personnage de scène, dont on aurait émoussé le tranchant et l’irrévérence potentiellement polémique, et dont on regrette que le cinéma n’ait jamais vraiment su que faire.
La partie la plus convaincante du film est sans nul doute celle qui saisit l’immensité blanche du grand nord et du Groenland, territoire qui intéresse depuis longtemps Bétbeder et qu’il avait déjà filmé dans Le Voyage au Groenland en 2016. On sent dans ces scènes un intérêt réel pour la culture locale, et un appétit documentaire à embrasser les maisons colorées, les chiens de traineaux et surtout ces paysages qu’il sait admirablement faire jouer, par d’habiles jeux d’échelles, avec les figures humaines de ses personnages.
On finit donc par se demander pourquoi le film a voulu faire rentrer au forceps une comédie peu convaincante et mal ficelée dans le moule de ces séquences qui, seules, semblent intéresser vraiment Bétbeder.
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Alexandre Piletitch
