Chroniques Express 121

 Jean Elliot Senior

Voici venir le numéro 121 de la revue express des albums avec au programme ce mois-ci : Bow Low, Laura Perrudin, Yeallow, Peal, Tazieff, Odran Trummel, Kristin McClement, Jean Elliot Senior, The Green Kingdom, Solkyri et Husbands.

 

bow-low-pochette-EPBow Low – Happy hunting undergrounds EP

Vainqueur du concours Inrocks Lab en 2012 et invité dans la foulée aux Transmusicales de Rennes, Bow Low est d’ores et déjà une valeur sûre du rock hexagonal. Après un premier album, 30w 10w, les revoici avec un court mais excellent EP. Il faut dire que les Normands propose une musique racée, entre sophistication et nonchalance. Une touche latine à la Doors (Artemis), une certaine appétence à la danse (Kabuki Dance à la sauce Who Made Who) ou encore un Beelzebub sur les traces du Golden Brown des Stranglers, Bow Low fait dans le mélange subtil et n’interdit rien. (4.0) Denis Zorgniotti
Because Editions – Janvier 2015 Bandcamp

lauraperrudin-impressionsLaura Perrudin – Impressions

Voilà un joli projet. Une jeune harpiste chantant d’une voix diaphane des textes d’Oscar Wilde, William Butler Yeats, Edgar Allan Poe, James Joyce et même de Shakespeare (pour le sonnet VII). La demoiselle s’appelle Laura Perrudin et elle est pourtant issue d’une formation on-ne peut-plus classique. La jeune femme arrive à insuffler une touche de créativité, plus personnelle, à des chansons, parfaitement interprétées, qui pourraient être des standards du jazz vocal. Il faut dire que sa harpe celtique chromatique ouvre de nombreuses possibilités harmoniques. Et puis,  elle habille ces douces mélodies d’électronique et de percussions. On s’éloigne dès lors de Diana Krall et on se rapproche de la personnalité plus originale d’une Emilie Simon voire d’une Colleen. Un jazz vocal 2.0 en somme. (3.5) Denis Zorgniotti
L’Autre distribution – Mars 2015

Yeallow-homebredYeallow – Homebred

Le rock, c’est parfois simple comme un titre de Yeallow. Attention, simple ne veut pas dire simpliste et il est justement souvent difficile de faire un titre qui coule de source. Ces Strasbourgeois  n’appartiennent à aucune chapelle : ni post, ni punk, ni trop indé dans le son, si ce n’est que le groupe est signé sur une petite structure (Try and Dy). Un son à l’ancienne, efficace et direct, avec un chanteur qui ne manque pas de charisme, des claviers minimaux et des guitares qui peuvent être  saignantes. Eux-mêmes se réclament d’un Brit rock – et on peut voir une filiation de The Fall à  Franz Ferdinand – ce qui leur a d’ailleurs valu de faire la tournée des clubs en Angleterre et même à Los Angeles et San Francisco. Et cela donne de bons morceaux et même deux excellents (Rosebud et Everywhere). L’essentiel est là. (3.5) Denis Zorgniotti
Try and Dy – Avril 2015 Bandcamp

PealPeal – s/t

C’est beau un disque où il se passe toujours quelque chose. Où chaque chanson ou plutôt chaque musique (le disque est essentiellement instrumental) ouvre de nouveaux horizons , dans une recherche permanente d’harmonie d’ascendances contraires. Où derrière une maîtrise exemplaire, se cache une vision globale faîte de liberté et d’intuition. Peal possède tout cela et même plus : ce premier album est le fruit d’un long parcours musical sinueux et riche d’expérience qu’aura accompli chacun des membres de ce trio (et anciennement Ortie et Totem). Et on en arrive là : à ces boucles de guitares, à cette association basse-batterie hautement inflammable, à cette musique qui jongle avec les styles  : new wave, noise, krautrock, jazz, afrobeat…entre autres influences de ce que l’on nommera in fine et paresseusement Post-rock. De toutes façons, plus que des mots ou des cases – inopérants pour Peal -, il faut surtout écouter. Et urgemment en plus ! (4.5) Denis Zorgniotti
Autoproduction – Octobre 2014 Bandcamp

Tazieff-By-the-KingdomTazieff – by the Kingdom

Un petit parfum 90’s version anglaise, une âme sombre et élégante, un groupe qui sait crée des ambiances autour de mélodies ciselées. Tazieff maîtrise son sujet sans arrogance mais sûr de son fait et de son talent. On retrouve chez ce groupe auvergnat ce côté pop élégiaque, encore marquée par la new wave à guitares,  qui émanait de Strangelove, Puressence ou de Whipping boy ; des groupes largement oubliés mais qui ont marqué positivement leur époque. Et en 2015, cela fonctionne encore, dans un album mixé par Peter Deimel (Anna Calvi, dEUS) où les passages ombrageux succèdent à des poussées orageuses. Toujours classieux, toujours porté par le charisme vocal de son chanteur/guitariste Christophe Moinard au timbre proche de Dave Gahan. (3.5) Denis Zorgniotti
Pocket Knife – mars 2015 Tazieff

odrantrummel-inthejarOdran Trummel – In a jar

Odran Trummel, on le connaît déjà et on l’aime. Notamment pour une singularité cultivée avec goût où la chanson dans son texte et sa mélodie reste toujours au centre d’une composition même foutraque. Le voilà de retour avec un nouvel album, joli objet – un vinyle sérigraphié – tiré à 300 exemplaires. Dans in the Jar, il est question d’une guitare acoustique qui aime s’emballer, de percussions qui percutent. Comme des musiciens de flamenco qui se mettraient au répertoire des Smiths et un blueman du vieux sud qui ferait de la pop sa nouvelle religion. Odran Trummel, c’est un peu the Incredible String band à lui tout seul, c’est Adam Green décomplexée dans une nouvelle définition de l’Antifolk, acoustique et psychédélique. Le tout avec une voix à faire pâlir de jalousie tous les apprentis charmeur de minettes. Chapeau bas ! (4.0) Denis Zorgniotti
Another record – mars 2015 Bandcamp

Kristin McClement - The Wild GripsKristin McClement – The Wild Grips

Dernière trouvaille du label auvergnat Kütu Folk (The Delano Orchestra, Evening Hymns, Pet…), Kristin McClement séduit d’emblée avec un premier album aussi sombre que bouleversant. Si Kristin McClement est originaire du Royaume-Uni elle a très vite quitté sa terre natale pour se transformer en une globe-trotteuse, sillonnant au fil des années de nombreuses contrées à travers le monde. Mai c’est pourtant du côté des Amériques qui faudra aller chercher ses influences et trouver des correspondances avec sa country folk très évocatrices qui nous balade durant 10 titres dans des endroits reculées, dans une nature sauvage et belle, pourquoi pas à dos de cheval.  Avec sa voix douce et triste, ses arrangements précis et luxuriants (cordes, saxophone, flûte, clarinette…) façonnés en compagne du collectif anglais Wilkommen, la demoiselle délivre un premier album très abouti, aussi subtil que sublime produit par Christian Hardy du groupe The Leisure Society. (4.0) Benoit Richard
Kütu Folk – avril 2015 Bandcamp

Jean Elliot Senior - Le domaine de la solitudeJean Elliot Senior – Le domaine de la solitude

Après le très beau Balade Sauvage paru en 2013, le garçon revient avec 10 nouvelles chansons, 10 nouvelles balades, légèrement plutôt orientées blues-folk, dans lesquelles l’ancien membre de Crevecoeur assaisonne encore une fois ses chansons de sonorités et influences diverses : sud-américaine comme par le passé, mais aussi hawaïenne (La mort à la plage, Les larmes de fond). Des compostions qui renvoie par moment à une certaine chanson française des années 70, celle d’Eddy Mitchell par exemple… si, si, il y a un petit côté Sur la route de Memphis dans cet album ! Quoi qu’il en soit, le dernier album de Jean Elliot Senior est une carte postale musicale très évocatrice, aussi belle que celles envoyées récemment par Naïm Amor ou Thomas Belhom… pleine de chansons bouleversantes comme Les sirènes qui vient clôturer en beauté Le domaine de la solitude. (4.0) Benoit Richard
Budde music france – mars 2015  Bandcamp

The Green Kingdom - LovelivesonThe Green Kingdom – Loveliveson

Après le très beau A Baoa Q signé du japonais Yamaoka présentant un mélange de musique ambient et de musique répétitive ; le label DISQ AN est de retour avec The Greek Kingdom qui décidément reste fidèle à Alexandre Navarro puisque déjà entendu sur le label SEM qui n’est autre que l’ancienne maison de disques tenue conjointement par Alexandre Navarro et Sasa Vojvodic. Pour sa première release sur DISQ AN, Michael Cottone / The Green Kingdom reste fidèle à son style ambient, avec au programme des sonorités électroniques planantes, glitch et crépitantes ainsi que des guitares triturées. Comme d’habitude, c’est un peu expérimental mais c’est surtout très doux, très beau très cotonneux… bref, encore un production très agréable à ne surtout pas manquer ! (4.0) Benoit Richard
DISQ AN – avril 2015 Bandcamp

solkyriSolkyri – Sad Boys Club

Avec Solkyri, on pouvait s’attendre à trouver ce qu’on allait écouter dès la lecture de la bio : le groupe australien a joué avec 65daysofstatic et il est signé sur Bird’ Robe Records, label ayant accueilli Sleepmakeswaves, un des fleurons australiens du rock instrumental. On sera donc prévenu : Solkyri  saura envoyer le bois dans une version puissante d’un post-rock ayant assimilé les apports de la new wave à guitares, le rock progressif et du métal. On pourrait se lasser au vue d’un album qui se complait dans des morceaux longs et fournis. Mais finalement, Solkyri, maître de sa musique, arrive à alterner passages atmosphériques finauds (avec piano, glockenspiel, violoncelle, arpèges de guitare) et montées électrico-énergiques toutes guitares dehors et arrive à ne pas lasser voire à charmer. La technicité – évidente – et la volonté de démonstration qui en découle, passent au second plan. L’essentiel est préservé. (3.0) Denis Zorgniotti
Bird’s Robe records – Avril 2015 Bandcamp

Husbands - LPHusbands – s/t

C’est beau l’amitié, a fortiori quand celle-ci aboutit à un excellent disque. Signé sur le label de Laurent Garnier, Husbands, c’est Mathieu Hocine (Kid Francescoli), Mathieu Poulain (Oh ! Tiger Mountain) et Simon Henner (Nasser). Un projet bis qui n’est pas secondaire -quant à sa qualité – ni primaire quant à ses arrangements. L’electro-pop des Marseillais a beau cultiver son côté DIY je-m’en-foustiste et fun, il recèle en son sein un agencement  savant d’harmonie, d’instruments et de sons.  Une production enveloppante, des claviers ludiques, de bons gimmick de guitares, une invitation à la danse, l’album peut aussi donner envie d’ entonner un refrain fédérateur entre amis (you, me, cellphones). Mais de l’autre, avec ces mélodies ciselées, son spleen au coin des lèvres, Husbands accouche dans le plaisir d’une musique fine et sensible – avec where is my ego ; run along, son comme point d’orgue d’un album addictif. Et toujours avec cet air de ne pas y toucher. On pensait tomber sur un groupe sympa et on découvre un artiste déjà majeur. (4.0) Denis Zorgniotti
Sounds Like Yeah / Pias – Mars 2015 Soundcloud