Alt-J (Δ ) – An awesome wave

Quand un groupe fait une telle unanimité au sein de la rédaction (nom pompeusement donné au webzine, quand plus d’un chroniqueur s’exprime sur un même sujet qu’un autre), je m’en veux de ne pas être le premier à  en parler sur les internets, pour que plein de gens en profitent dès sa sortie.

Alt-J (le code pour faire un Δ sur mac… Parce qu’en Pc c’est plus compliqué il faut passer par la table de caractères et ce serait moins sympa comme nom de groupe U+0394) est donc de ces albums à  mettre tout amateur de musique moderne d’accord avec son voisin. Un de ces bons albums qui brillent par leur originalité formelle autant que conceptuelle. Alors, quoi de mieux que de vous livrer deux critiques pour le prix d’une.

Je commence donc, à  tout seigneur tout honneur, par vous retranscrire ici la critique du taulier de ce webzine, telle qu’exprimée sur son blog parallèle (j’ai pas tout compris, mais c’est un blog où il met en »plus petit » qu’ici des trucs qu’il aurait envie sinon de mettre ici, mais ne veut pas parce qu’il peut pas faire des critiques assez fournies… Cherchez pas, moi non plus je comprends pas.

Alt-J fera donc partie de ces groupes qui dès leur premier album auront séduit le public et surtout montré une réelle originalité dans un univers musical pop indé qui, la plupart du temps, en manque sérieusement. Dans un registre qui aurait pu plaire au collectif américain Anticon qui publia en son temps les albums de Why? et surtout 13 & God (à  l’esthétique musicale assez proche de celle de Alt-J) mais aussi d’autre groupes capables de mélanger une esthétique pop à  un esprit electronica/hip hop, Alt-J s’impose sans mal, jouant à  la fois sur la simplicité et l’évidence de ses mélodies, sur la particularité de la voix de son chanteur Joe Newman aux tonalités et aux variations multiples (interlude I) et sur des arrangements plus que chiadés, aussi épatants qu’audacieux, dans une démarche expérimentale mais pas trop, assez proche par exemple de celle empruntée par Radiohead depuis de nombreuses années avec plus ou moins de réussite selon les albums.
Ajoutez à  tout ça deux singles à  tomber par terre : »Breezeblock » et surtout l’inusable »Matilda » et vous aurez là  un des albums de pop indé les plus modestes et les réussis de l’année 2012. Le genre de gourmandise qui vous laisserait presque croire que tout n’a pas encore été dit en matière de musique pop rock.

Il parle bien hein le chef ;-)

A-t-il tout dit. Oui presque. Mais j’ai toujours quelque chose à  ajouter. An awesome wave tient, à  mon sens, sur trois originalités. Je m’explique:

– Originalité du son: comme l’a dit Benoît, les Anglais de Alt-J pratiquent une musique sorte de mélange entre le hip hop et le rock. En matière de son, le groupe soigne les moindres détails d’une production léchée. Tout l’album tient énormément sur le jeu rythmé et parfois virtuose de la batterie montée très haut dans le mix, où elle vient souvent se mesurer à  la voix du chanteur. La basse, troisième composante sonore, jouant quant à  elle le rôle de garde chiourme à  la limite du groove du funk, mettant de l’ordre dans les cordes (violons etc…) synthétisées etc. L’ensemble est légèrement réverbéré, ce qui paie pour le groupe la taxe »années 80″ des formations récentes. C’est le seul tribut à  la période, d’ailleurs, et c’est très bien comme ça.

– Originalité formelle: Benoît l’ a dit mieux que moi, Alt-J mélange le hip hop à  la pop de façon singulière. Pour parler à  tout le monde, comment faire si ce n’est par une espèce d’équation foireuse dont j’ai le secret. Alt-J est une somme équivalente à  une multiplication ou x serait la quantité de génie intrinsèque. Rien de moins. On prend les principes du hip hop au front large, on y ajoute un peu d’agitation des tables de loi de chacun des genres qu’on aborde, on intègre une bonne base de psychédélisme barbu actuel, et une bonne dose de nu-folk inverti additionné d’un filet de disco. On obtient (X x 4). Ou dit autrement une dose de Shabazz Palaces+Animal collective+Fleet foxes+G-Love+Bee Gees = dose de génie x 4. Dit comme ça, ça fait peur. Mais à  l’écoute cet album est une totale réussite

– Originalité de la démarche: on en croise un tous les deux trois ans, au rythme actuel des sorties, de ces groupes qui prennent des éléments simples de l’histoire de la musique populaire pour les tourner dans un sens complètement inédit. Rappelez-vous comment à  l’époque on vous a présenté TV on the radio, Ariel Pink, Animal collective, ou Dirty Projectors. Alt-J (Δ ) fait assurément partie des artistes de cette trempe. Une fois encore et de manière aussi différente que les groupes précités ont abordé l’exercice, voici un groupe qui plonge dans les références, les sons, les méthodes ou les artifices du passé, mais se garde bien de copier scrupuleusement comme un bon moine copiste. Non. tout est réagencé de manière totalement inédite. Aurais-je un jour imaginé entendre du Cypress Hill prendre un titre d’Oasis, ou imaginer les Bee Gees poser leur voix avec Neil Hannon sur un titre de Syd Barret dans la cave de Depeche Mode. Sûrement non. Alt-J tente et réussit ce genre de grands écarts, avec une simplicité qui évite, et de loin, tout intellectualisme. On rentre dans l’album en se laissant perdre, puis emmener par la main. L’écueil de ce genre de disque est de fournir de beaux concept-albums mais parfois un peu éloignés de la pop musique au sens le plus général. Alt-J évite l’obstacle haut la main. Benoit cite »Breezeblock » et surtout l’inusable »Matilda » au rayon des tubes indiscutables de an awesome wave. J’en ajoute facilement deux trois dont something good, Fitzpleasure et Dissolve me qui sont des bijoux pop. On notera aussi qu’aucun de ces »tubes » possible ne ressemble à  l’autre, sur une ligne oscillant du hip hop à  la ballade psyché rock à  l’ancienne, avec choeurs et tout et tout.

Il n’y a aucun déchet sur cet album ou je préfère quant à  moi le versant le plus immédiatement pop. Mais assurément un des tous grands albums de 2012. Si en 2012 tu passes à  côté de Δ , tu as raté ta vie.

Denis Verloes

Label : Infectious/Pias
Date de sortie : 28 mai 2012

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