Lou Doillon – Places

Quand un album ne fait pas l’unanimité des cinq ou six mauvais génies qui peuplent mon ciboulot, je le laisse mûrir. Ainsi j ai fait de l’album de Lou Doillon.

Sur le papier le premier essai de la fille de Jane Birkin part sur de bons auspices. Un courant de sympathie non négligeable souffle sur la famille, et continue depuis la mort de Serge Gainsbourg à  réchauffer l’oreille des Français. La demi soeur de Charlotte jouit de cette aura bienfaisante. Il y a ensuite l’aurige rennais qui dirige la production. Après tout Etienne Daho a-t-il jamais réalisé un mauvais album? En a-t-il raté un seul à  la production? Plus globalement, y a-t-il un seul des groupes que le roi de la pop en France ait aimé ou adoubé qui se soit révélé une sombre bouse? Non. L’éternel jeune premier de la pop (satori) a une oreille sûre. Et s’il aime l’album de Lou Doillon on a envie de lui emboîter le pas.

La première écoute m’ a charmé. Lou Doillon ne murmure pas. Elle chante. Et je ne sais par quel préjugé étrange je m’étais figuré le contraire. La jeune femme a même un timbre assez caractéristique, un voix très chargée d’émotion, et une aisance évidente dans sa langue de Shakespeare maternelle. En guise de signature vocale il y a même cette fêlure si caractéristique, ce voile qu’on dirait d’amertume qui personnalise son chant et donne a l’ensemble une couleur blues ou country moderne.

Puis Doillon manie la guitare sans rougir et sait comment poser en midtempo des histoires qui semblent toutes personnelles. On songe parfois à  Alela Diane pour ce métissage blues rock country pop. Je suis bluffé de la manière avec laquelle la jeune femme maîtrise les codes et la forme du genre qu’elle a choisi d’explorer. La production du gars Daho accentue l’émotion mais conserve le côté brut, entier, de la jolie femme qui déroule ses peines, ses désillusions, sa vision du monde, armée de sa seule 6 cordes. Il a fait un beau boulot qui met en valeur la simplicité et l’apparente sincérité de l’artiste qui s’essaie a un nouvel art.

Et pourtant… Plus je l’écoute et plus l’album s’use. J’ai cherché pourquoi. Contrairement à  d’autres détracteurs, la voix me charme, j’aime le style, l’ambiance du disque mais…. Et j’ai trouvé les germes de ma déception… Les mélodies ne suivent pas. Places,,  ne me convainc pas entièrement parce qu’il manque à  ce disque de frontière entre les genres, les mélodies qui ne s’étiolent pas au fil des écoutes, les refrains imparables, les morceaux extra-ordinaires qui feraient que j’y reviendrais sans vraiment m’en rendre compte.

C’est un écueil qu’on rencontre souvent pour un premier essai chez les pop stars britanniques. On sent qu’un truc ne demande qu’à  éclore qui n’est pas encore tout à  fait en place. On attendra le deuxième disque pour se forger un avis définitif, en regrettant presque la notoriété de l’artiste préalable a son premier effort de chanteuse. Une notoriété qui rend la presse hexagonale un peu trop conquise, et votre serviteur un peu trop avide d’éléments que je ne trouve pas tous encore dans le premier album de Lou Doillon.

Un album bien fait, précis, et soniquement maîtrisé, auquel ne manque finalement qu’un petit peu de magie.

Denis Verloes

Tracklist

Date de sortie: 3 septembre 2012
Label: Barclay / Universal

Plus+
Le site officiel
La page facebook
Twitter
ICU via Youtube