Une Mélancolie arabe, de Abdellah Taïa

melancolie.jpgAprès une trilogie ouvertement autobiographique qui relatait son adolescence, la découverte de son homosexualité, ses doutes et turpitudes quant à  son identité d’origine (arabe) comme sexuelle, ses difficultés à  s’assumer et à  accepter sa singularité, Abdellah Taîa sort son quatrième ouvrage, qui traite »du même sujet.

Encore une fois, son écriture poétique, sombre et romanesque, retrace son enfance près de Rabat, où il est la victime d’un viol par plusieurs garçons, alors qu’il éprouvait du désir pour l’un d’entre eux. Il évoque ensuite les difficultés à  se restructurer après cette tragédie, et à  s’assumer ensuite à  Marrakech où il devient adulte, puis à  Paris et au Caire, où il travaille, vit, et essaie de vivre pleinement son homosexualité comme son appartenance à  la culture et au monde arabe.

Phrases simples mélangées à  quelques envolées lyriques, précisions des sentiments et des contradictions de l’âme, exaltations de ses passions pour la culture maghrébine et les corps, Abdellah Taîa signe un nouvel épisode de sa vie mouvementée de manière poétique et revendicatrice, tout en se posant comme victime d’un monde soumis aux préjugés, un monde cruel, dans lequel les sensibilités à  fleur de peau ont du mal à  s’afficher. Le début de l’ouvrage est violent, superbe, mais au fur et à  mesure des différentes petites morts et résurrections de l’auteur, l’ensemble se plombe d’affect et de sensiblerie un peu trop appuyée, ce qui affadit les propos de son auteur. Qui plus est, en ressassant toujours les mêmes idées et thématiques pour ces romans qui ne restent qu’au stade de l’autobiographie stricto sensu.

Dommage donc de ne pas lire  » Une mélancolie arabe  » sortir du sentier battu de l’oeuvre déjà  bien riche de Taîa pour s’ouvrir au véritable roman fictionnel dans lequel ce dernier puiserait dans son existence des éléments propres à  l’enrichir. Et laisser ainsi libre cours à  sa plume talentueuse, écorchée vive et particulièrement émouvante, comme les dernières pages et le beau poème final de Bachar Ibn Bourd.

Jean-François Lahorgue

3.gif

Une Mélancolie arabe
de Abdellah Taîa
Editeur : Seuil
142 pages – 13 €¬
Parution : mars 2008