Enter the Wu-Tang (36 Chambers) : Les 9 Diagrammes du Wu-Tang Clan

1993. Une époque où Rudy Giuliani n’avait pas encore lavé les trottoirs de New-York à la javel et « karchérisé » les murs crasseux de la Big Apple ; ces murs immenses de buildings pour riches où un tag dégoulinant semblait narguer la ville : WU-TANG CLAN !

Enter the Wu‐Tang 36 Chambers

Le Crew de Brooklyn venait de cracher son premier album comme on crache sa chique au coin de la rue. Poisseux, Minimaliste, ultra-référencé, le Wu-Tang tape fort et juste et signe un album majeur de la East Coast et du Rap US en général.

ça commence comme ça.
Trois potes. Trois geeks.

Nourris de Soul, cette Soul 70’s qui transpire sous les bras et qui te roule des patins chaque fois que tu la croises.
Cette musique sensuelle qui te regarde droit dans les yeux et te chope par les couilles avec un petit sourire coquin. Ces rythmes s’enroulant le long de ta jambe, qui remontent lentement et viennent te chatouiller l’entrejambe.
Cette Soul si chaude, si libre, qui à force de se donner à tout le monde, est tombée sur un mauvais garçon. Tombée sur ce Funk viril, ce Funk « JamesBrownien » bourré de testostérone, qui a attrapé notre pauvre Soul sur un escalier de service entre 2 blocs pour lui faire un môme :

Le Rap !

C’est cette trinité Black, cette famille Américaine intenable qui chatouille de plus en plus les oreilles de nos trois potes.
Ce Rap qui traîne les rues depuis le début des années 80 comme nos trois potes.
Ce Rap qui a tellement de choses à dire, à faire écouter mais qui reste le cul posé sur son banc, faute de réelles opportunités, exactement comme nos trois potes.

Il y a RZA « The Scientist », GZA « The Genius » et Ol’ Dirty Bastard « The Specialist ».
Voilà nos trois potes.
Des mecs bien décidés à se sortir de la routine New-Yorkaise où il est plus facile de finir avec une balle dans la peau qu’avec un putain de disque d’or.
Il y eut des projets solos avec des labels incompétents et des tentatives d’auto-prod restées « lettre morte » dans les tiroirs des maisons de disques.
Tout cela forgeant la méfiance du Crew envers les labels et une rage de réussir chevillée au corps et aux tripes.

Traînant leurs guêtres dans le Hip-Hop New Yorkais depuis un petit moment déjà, le Crew ne tarde pas à s’élargir.
Les ramifications sont nombreuses dans l’ East Coast depuis les succès du Public Enemy, Mobb Deep ou les Beastie Boys; et ce, malgré l’assoupissement progressif du Rap de la « Big Apple » au profit du G-Funk Californien.

1993 ! Tout est prêt !!
Nos trois potes se retrouvent désormais à neuf.
Raekwon
, Ghostface Killah, Inspectah Deck, Method Man, U-God et Masta Killa se rajoutent au trio RZA, GZA et Ol’ Dirty Bastard.
Et Le Crew devient le Wu-Tang Clan.

Le monde du Rap n’en croit pas ses yeux rouges.
C’est du jamais entendu ! FUCKING SHIT !!
Le petit cul Black du Hip-Hop violé sans ménagement dans un gang-bang hardcore ou les neuf membres du Wu-Tang rivalisent d’ardeur et de mots salaces.
Des beats lourds comme les seins et les fesses huilées des « bihatchs » qui se trémoussent en string dans leurs clips.
Une basse profonde et marécageuse qui fait trembler les bases même du style.
Des flows ultra-nerveux crachés par terre comme un vieux chewing-gum.
Des samples picorés dans les séries B Hongkongaises des 70’s, à base de coups de gong et de tartes dans la gueule.
Une ambiance poisseuse comme un coin de rue dégoulinant puant la pisse.
Des moines Shaolins dégénérés faisant de leur temple sacré un haut-lieu de la came et du stupre. Apprenant consciencieusement à rouler leurs bédos les yeux fermés et à se faire sucer sur une jambe.

Des moines Shaolins Blacks, sapés comme c’est pas permis, avec pour seule arme, et pas des moindres, un Rap moderne, neuf et sans concessions.
Un album titanesque, en apesanteur.
Un disque comme chorégraphié par Tsui Hark, tourbillonnant, virevoltant, emportant tout sur son passage.
Mixé et samplé par le grand RZA qui fera de ses huit disciples, les maîtres incontestés du Hip-Hop.

RZA Statufié et doré à l’or fin , ainsi que les 8 autres membres du Wu-Tang, trônant au milieu de ce temple reculé. Contemplant d’un oeil bienveillant et goguenard le monde du Rap, perchés haut, très haut sur leurs socles de marbre.

Renaud ZBN

Enter the Wu-Tang (36 Chambers) est sorti le 9 novembre 1993, sur le label Loud Records

2 thoughts on “Enter the Wu-Tang (36 Chambers) : Les 9 Diagrammes du Wu-Tang Clan

  1. Mon cher Olivier. Je vous trouve très pointilleux et vous avez entièrement raison.
    Pour ce qui est de l’influence de Mobb Deep sur le Wu-Tang vous avez raison Juvenile Hell( sorti quelques mois avant les 36 Chambers tout de même) n’aura pas de succès et n’inspirera pas le crew, c’est une erreur de ma part de l’avoir placé nonchalamment entre le Public Enemy et les Beastie. Pour Staten Island, il est encore vrai que certaines figures du crew en sont natifs mais RZA,GZA, ODB, Inspectah Deck et Masta Killa sont originaires de Brooklyn selon les sources.
    Voilà, mon cher, en espérant que ces quelques bourdes ne vous ont pas trop gâché votre lecture.

  2. RZA, GZA et ODB sont cousins et non des potes, et concernant Brooklyn il est vrai que certains membres viennent de ce quartier mais le groupe est affilié a Staten Island qui depuis leurs succès à été rebaptisé Shaolin.

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