[Interview] Circa Waves : “Quand vous offrez de la musique aux gens, vous les nourrissez”

Après avoir assisté à leur généreux concert à Petit Bain pour célébrer leur dernier album, Never Going Under, on a eu envie de faire passer à Circa Waves le test de notre « Questionnaire de Proust ». C’est le bassiste Sam Rourke qui s’est prêté avec humour et gentillesse à l’exercice.

Circa Waves
Photo : Lewis Vorne

Pas encore vraiment reconnus en France, Circa Waves nous ont offert le mois dernier un concert parisien mémorable, qui nous a donné l’envie de les rencontrer. Il faut dire aussi que leur nouvel album est leur meilleur, celui où ils conjuguent idéalement un formidable talent pour écrire des mélodies pop « classiques », et une profondeur émotionnelle nouvelle… Voici donc les réponses de Sam Rourke, bassiste du groupe et leur représentant pour cet interview, à nos neuf questions habituelles…

1. La principale caractéristique de votre musique :

Sam Rourke : On est juste un groupe de fête (NDR: « a party band », littéralement) ! Parfois vous allez à un concert, et vous voyez tout le monde debout, en train de se gratter le menton… Chez nous, c’est : « Voilà de grandes mélodies pop, tout le monde va bien s’amuser, tout le monde va finir dégoulinant de sueur… ». Et c’est juste ça, ce qu’on fait…

2. La qualité que vous voulez vraiment avoir dans la musique que vous faites :

Never Going UnderSam Rourke : On est un groupe très ambitieux, on veut toujours être meilleurs, devenir plus « gros » ! Il pourrait y avoir eu des points dans notre carrière où nous aurions pu nous contenter de la musique que nous faisions, mais on trouve toujours qu’on n’a pas été encore assez loin. Et nous sommes, à ce moment, même si ça semble être un peu « pipeau » de dire ça, très contents du dernier album, où nous avons réussi à concentrer toutes nos influences : chaque album doit devenir un peu plus ce qui définit l’essence de Circa Waves. Le format de l’album est celui qui a défini la musique, quand nous étions jeunes, et nous aimons qu’un bon album, comme les classiques que nous aimons, démarre de manière puissante, mais se termine en douceur, avec plus de profondeur…

3. La qualité que vous aimez trouver dans les groupes ou les artistes que vous écoutez :

Sam Rourke : Moi, personnellement, je suis un peu différent des autres dans le groupe, je suis fan des Beatles et de McCartney en particulier : j’aime trouver dans une musique des surprises, des changements d’accords, de tonalité auxquels je ne m’attends pas. McCartney est un génie pour ça, il y a souvent ces moments dans ses chansons où vous vous dites : « J’ai jamais entendu ça avant, je ne pensais pas qu’on pouvait faire ça ! », c’est étonnant !

Sinon, quand j’étais ado, j’adorais le Black Metal, Metallica était mon groupe favori. Mais encore plus jeune, j’ai eu une phase Michael Jackson, mon oncle m’avait fait une cassette, et je l’ai écouté des centaines de fois. Sinon, aujourd’hui, j’écoute pas mal de musique électronique, Floating Points par exemple…

On a des goûts très éclectiques dans le groupe, tout me va, sauf la musique country, un truc que je ne suis clairement pas câblé pour comprendre… (rires)

4. Qu’est-ce que vous aimez le plus dans la façon dont vous créez votre musique aujourd’hui ?

Sam Rourke : Dans le groupe, chacun a sa propre spécialité, un truc dans lequel il excelle. On a identifié ces forces au long des 10 ans que nous avons passé ensemble. Chacun apporte quelque chose de différent, donc on s’assemble parfaitement, aucun d’entre nous n’a besoin de faire des choses qu’il n’aime pas naturellement faire… Kieran écrit les chansons, il est fantastique. Joe a commencé à diriger les clips vidéo, Colin est brillant avec la gestion des réseaux sociaux, il fait en sorte qu’il y ait toujours des trucs pertinents, des petites vidéos sur nous. J’ai commencé à jouer un rôle de directeur technique, à gérer tous les aspects techniques sur les tournées. Ceci signifie que nous contribuons tous au groupe…

5. Le principal problème auquel vous êtes confrontés dans votre carrière :

Sam Rourke : Spotify et l’Internet ont eu un gros impact sur la Musique, et pas toujours pour le meilleur. Un côté positif est qu’une bonne chanson que vous postez peut d’un seul coup créer une connexion avec le bon public, par la grâce de ces algorithmes que je ne comprends pas vraiment. Un groupe anglais comme nous peut rencontrer le succès aux USA, au Mexique, en Australie… C’est quand même une vraie opportunité, sans dépenser des milliers de livres en promotion…

Mais c’est à double tranchant. Je me sens parfois abattu par les aspects négatifs de tout cela… Heureusement, ma femme, qui est à l’opposé de moi, me réconforte toujours. C’est bien d’avoir une femme pour nous éviter d’être stupide ! (rires)

 

Circa Waves
Photo : Lewis Vorne

6. Que faites-vous en dehors de Circa Waves ?

Sam Rourke : Nous travaillons tous sur notre propre musique en dehors du groupe, comme un hobby. Kieran a développé un projet solo pendant le confinement. Colin et moi avons commencé à écrire ces dernières années… Sinon, on est tous fans de cuisine, c’est un truc qui nous réunit tous… Quand je ne suis pas en tournée, que je suis à la maison, alors que ma femme, qui est productrice, passe sa journée en studio, je passe l’après-midi à essayer une recette pour le repas du soir. En fait, je deviens très « domestique » quand je ne suis pas en tournée.

7. Votre plus grand rêve pour Circa Waves :

Sam Rourke : C’est évidemment jouer en tête d’affiche au Festival de Glastonbury. Depuis mon enfance, je ne pourrais pas imaginer quoi que ce soit au-delà de ça, c’est le sommet pour un groupe anglais !

8. Votre pire cauchemar en tant qu’artiste :

Sam Rourke : Je fais ce cauchemar récurrent où on donne un concert, et tout notre matériel se met à tomber en panne. J’essaie désespérément de réparer tout ça, et le public commence à quitter la salle (rires). C’est ma version du cauchemar du lycéen qui arrive à un examen et qui n’a rien révisé… Et je fais ce cauchemar tout le temps ! Mais, bon, il n’y a pas besoin d’être génie pour en comprendre la signification (rires)

9. Si vous n’étiez pas Sam Rourke, membre de Circa Waves, que seriez-vous ?

Sam Rourke : J’ai décidé il y a peu que, après le groupe, j’irais dans une école de cuisine, et que j’ouvrirais un petit restaurant, je veux devenir un chef, proposer quelques plats de pâtes… Quand vous jouer de la musique, quelque part, vous nourrissez les gens, vous leur offrez du bien-être… C’est un cadeau que nous faisons aux gens. Comme offrir de la nourriture que vous avez préparée pour eux.

Benzine : C’est marrant, parce que le mot qui m’est venu à l’esprit en vous écoutant jouer est « générosité »…

Sam Rourke : Chaque concert que nous donnons, nous voulons sortir de scène épuisés, en ayant donné tout ce que nous pouvions. Quand le public se connecte avec nous, c’est comme ça. A Petit Bain, c’est arrivé, ça a été le meilleur concert que nous ayons jamais donné en France… Mais nous sommes en train de voir comment revenir jouer bientôt à Paris…

Propos recueillis par Eric Debarnot

Circa Waves – Never Going Under
Label : [PIAS] / Lower Third
Date de sortie : 13 janvier 2023