Piers Faccini – Between Dogs And Wolves

Dans un paysage musical dopé à  la chasse au buzz que remplace en un temps record une nouvelle hype tout aussi éphémère, il est toutefois des artistes qui abordent la musique comme un peintre conçoit la peinture, : autant exploration de leur monde intérieur que perpétuelle remise sur le métier de leur ouvrage, dans une démarche d’artisan modeste mais perfectionniste.

Ainsi, Piers Faccini qui sur Between Dogs And Wolves, cinquième album de notre folk song writer, après l’enchanteur et coloré My Wilderness, atteint une sorte d’expression idéale de son art délicat, en équilibre entre douceur consolatrice et pureté d’expression. Décor posé donc entre chiens et loups, feutré et intimiste, rivage océanique de plage bercée par le ressac de mélodies épurés et sculptées jusqu’à  l’os comme des galets polis par le mouvement perpétuel des vagues.

Univers sans âge que celui du discret gentleman, également peintre, qui s’inscrit autant dans la lignée d’un folk intemporel et délicat illustré par les maîtres Nick Drake ou Leonard Cohen qu’elle témoigne d’une sensibilité marqué par l’honnêteté et le respect de ses sensations les plus intimes.

Illuminées par une douceur automnale propice à  l’introspection, délivrées de son reconnaissable timbre velouté de feuilles et de sable, les dix pièces de Between Dogs And Wolves dominées par l’ascèse musicale forment pourtant un cocon accueillant, autant rempart dressé contre l’agitation et le bruit inutile que bréviaire à  la couverture de velours posé grand ouvert sur la table de chevet de nos états d’âme.

En globe-trotter infatigable et éternel baladin, ce nouveau chapitre de l’anglo-italien synthétise son amour des folk songs à  la mélancolie séminale (Broken Mirrors, Wide Shut Eyes) teintées de blues et discrètes influence world. Le réceptacle de ses tourments intimes auprès de l’éternel,  féminin (Girl In The Corner, Black Rose), qui le voit retrouver avec sensualité sa langue natale (Il Cammino), dépasser l’aspect scolaire de son français domestiqué en une touchante ballade (Reste La Marée),,  et qui rédige le plus subtil et épuré des journaux intimes.

Une perle d’album dessinée avec une délicatesse d’icône byzantine, traversée d’arrangements d’inspiration discrètement moyen-orientale, soutenue à  chaque plage par la contrebasse de Jules Bikoko et le violoncelle de, Dom La Nena. Écrin épuré au tempérament rêveur, traversé par l’élément liquide, manifeste d’artisan exempt de toute volonté démonstrative, ce beau disque d’humeur saturnienne se créera sans doute quelques détracteurs qui lui reprocheront sa nature classique ou sa trop grande quiétude, étrangers à  tous défrichages modernes, avant-gardistes ou autres.

Il suffit cependant de bien tendre l’oreille pour se retrouver instantanément sous le sortilège de ses complaintes, fausses berceuses mais vrais philtres ensorcelants (nocturne Wide Shut Eyes, apaisé Pieces Of Ourselves, cristallin et splendide Feather Light).

Un art folk pop consommé pas si éloigné d’un orfèvre récent tel Cass Mc Combs et qui témoigne de son amour jamais démenti pour les idoles du genre, (Cohen, Tim Hardin, Bonnie Prince Billy, Skip James, Bob Dylan) auxquelles il tire d’ailleurs son coup de chapeau dans Songs I Love, recueil de ses covers sur la version collector de cet album.

Que je ne saurais encore une fois trop vous recommander, assurément en cet automne musical souvent décevant, le plus attachant des voyages immobiles que vous puissiez faire. Thank you, Piers., , ,

Franck Rousselot

Piers Faccini,  – Between Dogs And Wolves
Label : Beating Drum
Sorti le : 23 septembre 2013

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1 thoughts on “Piers Faccini – Between Dogs And Wolves

  1. Salut c’est Francky 01 du blog Muziks et Cultures

    Je n’ai hélas pas encore écouté ce nouveau Piers Faccini mais j’ai aimé chacun de ses autres LP. C’est étrange de se dire que son first LP s’appelait « Leave No Trace ». Et bien il aura eu tord, fort heureusement, et il aura bel et bien laissé une trace, indélébile et profonde.

    Je l’avais découvert en 2002 sur l’album solo de Vincent Ségal et son violoncelle électrique virtuose, l’expérimental et rempli de duos « T-Bone Guarnerius ».

    En plus, Piers est poète et peintre.
    A +

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