[Neflix] The Soul : un étonnant mélodrame avec twists inclus

Oui, au milieu de tombereaux de films de genre très ordinaires que les plateformes déversent sur nous, il y a des bonnes surprises, comme le beau « mélodrame à twists » qu’est The Soul, un étonnant petit film taiwanais.

The Soul
Chang Chen – Copyright Netflix

The Soul se présente a priori comme un film de genre respectant parfaitement la charte Netflix : un thriller de science-fiction au look soigné,… dont on n’attend pas forcément grand-chose au-delà de quelques minutes de distraction (cet « entertainment » cher à nos amis Américains qui semble être devenu l’horizon – limité – du cinéma actuel), et encore… si tout se passe bien ! La bonne surprise que nous réserve ce film taïwanais est de ne pas se conformer à ce programme routinier, et d’aller voir ailleurs si ses spectateurs vont le suivre. Bon, que ceux qui se souviennent encore ici combien le cinéma taïwanais fut naguère brillant, à l’époque des deux nouvelles vagues successives qui le révélèrent au monde, d’Edward Yang à Tsai Ming-Iiang en passant par Hou Hsiao-hsien bien entendu, ne rêvent pas non plus, on est loin avec The Soul de telles hauteurs / auteurs ! D’ailleurs, s’il y a une faiblesse criante dans The Soul, c’est bien la banalité de la mise en scène vraiment peu inspirée de Cheng Wei-Hao

The Soul affiche… Car The Soul est avant tout un « film de scénario » : prenant la forme d’une enquête policière sur l’assassinat brutal d’un célèbre et puissant homme d’affaire taïwanais par son fils sous l’emprise apparente de forces démoniaques, il se base sur un argument « science-fictionnesque » un peu bateau désormais, celui de l’insémination par une nouvelle technologie de « l’âme » (l’esprit en fait…) d’une personne dans le corps d’une autre. Mais The Soul va très vite s’avérer avant tout un mélodrame assez poignant, secoué régulièrement par des twists malins qui redéfinissent complètement ce que l’on a cru comprendre de l’histoire, mais aussi, et c’est plus intéressant en fait, les rapports entre les personnages.

Dans le fond, le sujet unique de The Soul, derrière son script plutôt bien écrit, et certainement très efficace, c’est une question très classique au cinéma : « que pèse l’amour face à la mort (ici le cancer, qu’affrontent aussi bien le fameux homme d’affaires que le procureur chargé de l’enquête) » ? Et, bien entendu : « Jusqu’où seriez-vous capables d’aller pour sauver votre amour ? ». Dans le rôle principal d’un homme intellectuellement brillant et d’une intégrité sans failles, que sa santé déclinante va confronter à des choix difficiles, Chang Chen – oui, le garçon de 14 ans qui resplendissait dans A Brighter Summer Day – confirme sa renommée comme l’un des plus grands acteurs asiatiques actuels (on l’a revu depuis dans des chefs d’œuvre comme, excusez du peu.., Happy Together, Tigre et Dragon, 2046, Eros, les 3 Royaumes, The Grandmaster, The Assassin !) et porte largement le succès du film sur ses épaules.

Et on se dit, après un dernier twist particulièrement bien amené que ce film malin, qui pose en outre de très bonnes questions sur l’identité sexuelle, est bien l’un des mélodrames les plus efficaces vus depuis un bon moment. Ce qui est vraiment étonnant…

Eric Debarnot

The Soul
Film taïwanais de Cheng Wai-Hao
Avec : Chang Chen, Janine Chang Chun-ning, Sūn An-Kě…
Genre : mélodrame, thriller, science-fiction
Durée : 2h05
Date de mise en ligne (Netflix) : 14 avril 2021