JayZ a lancé un service de streaming musical. Encore un.

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Annoncé avec tambours et trompettes  par tout le carnet d’adresse people de Jay-Z, on a BEAUCOUP (trop?) parlé du service de streaming lancé ce jour par le rappeur: Tidal

Coldplay, Madonna, Daft Punk, Alicia Keys, Kanye West, Arcade Fire, Beyoncé, Coldplay, Calvin Harris, Jack White, Nicky Minaj, Rihanna, Usher… Ils étaient tous là lors de la conférence de presse de lancement ce lundi, du service Tidal dont ils sont actionnaires.

Jay-Z avait prétendu dans la presse spécialisée qu’un véritable bouleversement allait se produire, les règles allaient changer, le monde verrait comment l’avenir serait aux mains des artistes. Jay-Z avait investi dans un service rien qu’à lui , pour se mettre sur la route des géants de la musique, des streamers en vogue et du  Beats streaming de Apple à paraître. Uh Yeah !

Moi ballot je pensais du coup que les artistes allaient enfin renégocier leurs contrats d’artistes avec les labels, qui à force de ne plus vendre de disque, remontent de plus en plus dans la chaîne de la gratte aux droits d’auteur (récupération des droits sur les lives enregistrés, quand bien même il ne s’agit pas de droit phonographiques, reprise d’une somme pour la promotion des artistes….).

J’étais persuadé que les ténors de la musique qui remplissent les stades allaient se réapproprier leur destinée. Le top, dans un monde où l’objet « disque » vendu par les maisons de disque, a quasiment disparu. Et que pour ce faire ils allaient négocier, sur une plateforme de streaming à laquelle ils président, des tarifs intéressants sur les contrats publicitaires, pour bypasser à la fois l’hégémonie de Spotify ET les royalties aux producteurs de disque.

J’étais persuadé que Jay-Z allait créer la boîte de production de musique du futur. Directement de l’artiste au consommateur, du rockeur au fan. En se rapprochant des usages contemporains pour se passer des gourmands intermédiaires. L’avenir quoi, celui où l’artiste applique des méthodes de demain: la musique qu’on consomme, mais qu’on achète plus, dans une entreprise nouvelle où les maisons de disque à l’ancienne n’ont pas voie au chapitre et où le dialogue s’installe directement entre l’artiste et son fan mélomane.

Et en fait … Ben en fait non. Une rumeur persistante annonçait même que Rihanna sortirait son nouveau disque directement via Tidal: l’intéressée, pas prête à se mettre à dos sa maison de production discographique, a rapidement démenti. Sur Tidal, on aura donc dans un premier temps, un service de streaming de haute qualité audio et des vidéos d’artistes qui se filment dans l’intimité (puisque c’est la seule chose sur laquelle ils ont vraiment les droits rien qu’à eux).

On aurait pu croire que le modèle allait consister à gagner plus en partageant avec moins de monde. Ou en partageant mieuw avec les gens en place. C’est d’ailleurs ce que vantait Jay-Z le jour du lancement dans une longue interview avec Billboard.  En fait non plus. Tidal refuse entièrement le modèle gratuit financé par la publicité qui a fait le succès de spotify. Oui oui tu as bien lu. Pour l’art, pour l’avenir, pour la révolution… Les artistes réunis au sein de Tidal ont… ben décidé d’encore une fois taper au même endroit: le fan.

Tidal aujourd’hui c’est donc un service de streaming sans version gratuite, dont le ticket d’entrée (sans pub du coup) est de 9,99$ qui peut faire le rôle de Spotify et Youtube mais en en Flac / Alac (bye bye MP3) , puisque le service inclut aussi un système streaming vidéo. Mais la révolution est ailleurs, prétend Tidal. Pour 19,99$, oui tu as bien lu, Tidal propose aussi une version Hi Fi, au son en Flac / Alac HD. Un service payant qui permettra en plus de voir Madonna donner des cours de cuisine ou Chris Martin parler de sa playliste idéale pour rouler à bicyclette. Mais un service vertueux où le consommateur sait qu’il participera d’un système où l’artiste mangera mieux, pourra négocier en position de force avec son label ou pourra sortir des morceaux hors format refusés par les labels… Moui moui.

Reste qu’on n’a toujours pas entendu un avis de client/cible ni la meute des maisons de disque bien préciser quels sont les conditions de diffusions de « matériel original », live et autres, dans un service quand bien même dirigés par les artistes. Pas trop de risque que rien ne change rapidement .

Voilà voilà. Ceci n’est pas une révolution. Donc. Donc ben on s’en fout. Qui va payer 20 balles par mois pour écouter un pur son dans des écouteurs de merde sur son téléphone dans le métro?

Quels enseignements?

– Je note: le rendez-vous manqué.  Les artistes ont / avaient une plateforme de distribution autonome qui leur permet de distribuer directement leurs clips et productions  audio. Aucun n’ose se mettre à dos ni Vevo / Google, ni son cher label

– Je note: que c’est encore le consommateur qui est vu comme la vache à lait. A 20 boules, j’espère au moins recevoir un objet, un truc, une place de concert en plus de mon stream, de la qualité dont je me fous

– Je note: que le vrai débat concernant les intermédiaires de la musique est éludé, ce qui prouve que la « révolution » est vraiment compliquée, quand on est aussi un gros vendeur de disque (franchement tu crois vraiment que sans masse critique les maisons de disque vont retirer tout le catalogue de Spotify, pour aller renégocier, artiste par artiste sur Tidal???

– Je note au vu des premiers retours: que la qualité du son, le consommateur s’en fout. Quand bien même il a sur le crâne un casque à 300 boules, il n’aime pas qu’on lui demande 20$ pour le stream

– Je note: que personne ne rappelle que Justin Timberlake allait aussi sauver Myspace, tu te souviens. Ou Neil Young qui allait changer la manière dont on écoute de la musique via Pono

Denis Verloes