[Live Report] Arctic Monkeys à Rock en Seine : un job alimentaire ?

Le set peu convaincant de Arctic Monkeys jeudi à Rock en Seine a surtout montré que la vraie star de la soirée était le public, chaud bouillant… Et pose de nombreuses questions quant à l’avenir du groupe…

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Arctic Monkeys à Rock En Seine – Photo : Robert Gil

Un concert rock peut parfois ressembler à une Grande Messe où les fidèles viennent communier. Sans doute est-ce pour cette raison que Lennon avait proclamé que le groupe dans lequel il officiait était plus populaire que Jésus Christ. Le public de Rock en Seine avait demandé au festival le retour des Arctic Monkeys. Son vœu a été exaucé et il est venu en nombre et plein de ferveur. Sauf qu’on a connu des prêtres donnant plus d’émotions à leurs fidèles qu’un Alex Turner. Et du coup ce concert faisant partie d’une tournée d’été précédant un nouvel album à la rentrée a engendré des questions qui fâchent.

2022 08 25 Arctic Monkeys RES RGLe meilleur acteur du concert fut le public, nettement plus chaud que celui de pas mal de concerts rocks récents sur la capitale. Un public qui connaissait par cœur tous les classiques du répertoire du groupe. Et pas seulement ceux de AM, l’album qui a fait changer Arctic Monkeys de dimension. Le Do I wanna know ? introductif du concert a ainsi atteint le milliard de vues Youtube, chiffre rare pour un morceau rock. La fosse s’est immédiatement transformée en volcan ininterrompu et une partie du public a lancé des pogos au cours du set. Peut-être tout cela est-il en partie dû à une non négligeable présence anglo-irlandaise, présence souvent accompagnée d’un peu d’alcoolémie ?

Avec un tel public réagissant au quart de tour aux premières notes d’une setlist compilant tous les classiques du groupe (Four out of five excepté), Alex Turner n’avait évidemment pas beaucoup d’efforts à faire pour conquérir la foule. Le problème est qu’il s’est contenté d’un service minimum, n’interagissant quasiment pas avec le public et semblant exécuter son set comme un job alimentaire. Par exemple jouer pour la énième fois un bout de War Pigs de Black Sabbath en fin d’Arabella. Idée sympathique mais déjà vue lors de tous les concerts du groupe depuis AM. Turner était distant là où au Zénith il semblait plus impliqué. Parce qu’il avait alors un album divisant les fans (Tranquility Base Hotel and Casino) à défendre ? Et ne parlons même pas du dernier concert des Last Shadow Puppets à Rock en Seine durant lequel il alternait déhanchés et pitreries.

2022 08 25 Arctic Monkeys RES RGDu coup, ça donne envie de se demander si les Arctic Monkeys ont un jour été un grand groupe de scène. Le groupe s’est fait sa place dans l’Histoire du rock au travers de sept albums au cours desquels il ne s’est jamais répété musicalement. Surtout, Alex Turner a ajouté sa plume à la liste des grands chroniqueurs d’époque du rock anglais (Ray Davies, Paul Weller, Morrissey, Jarvis Cocker…). Il fut capable de faire se télescoper Duran Duran et Shakespeare pour parler de drague en boite de nuit, les polos Lacoste et Martin Scorsese pour évoquer une relation amoureuse passée (respectivement I bet you look good on the dancefloor et Knee Socks, tous deux joués ce soir). Sur scène, il a souvent offert une dégaine, une attitude, parfois un peu d’implication mais jamais rien qui lui permette de trôner à la droite d’Iggy. On ne peut pas toujours tout avoir.

L’autre question posée par le set est celle du futur musical du groupe. C’est comme si le peu de conviction du groupe à interpréter ses classiques racontait une lassitude, une envie de passer à autre chose. Sauf que si c’était effectivement le cas, pourquoi ne pas avoir ajouté plus de morceaux de The Car, nouvel album à paraître en octobre ? I ain’t quite where I think I am, seul morceau inédit du soir, avait du coup le goût de ces morceaux nouveaux inclus par les vieux groupes pour tenter de cacher le côté Best Of de leur set. Le morceau n’était pas déplaisant avec son côté funk froid et ses guitares wah wah mais manque peut-être d’un refrain accrocheur. Pour l’album : à suivre fin octobre donc…

Texte : Ordell Robbie
Photos : Robert Gil